La première mi-temps du Borussia Dortmund à Köln a rappelé quelques très mauvais souvenirs de la saison passée, ceux de matchs abordés sans toute la détermination nécessaire. Dominé dans l’engagement pendant une heure, le BVB est toutefois parvenu à faire la différence grâce à son banc et à son ascendant physique. La fête continue !

Dans la noble profession libérale que j’ai l’honneur d’exercer, nous avons la possibilité d’exploiter un banc de foire. Contrairement à ce que son nom semble indiquer, un banc de foire n’est pas un objet en bois où poser son séant (ou ses pieds) en buvant de la bière et en chantant de la Schlagerparade. Non, un banc de foire est un bureau ou une étude secondaire pour aller à la rencontre de notre clientèle dans une autre localité que celle où nous exerçons notre activité principale. Dans ma profession (de foi) de supporter, mon activité principale s’exerce incontestablement à Dortmund : c’est là que j’y ai mon club, mes abonnements, mon appartement, mes amis, mes habitudes… Mais si j’ai un banc de foire en Allemagne, ce serait bien à Cologne : c’est la ville et le stade que j’ai le plus fréquentés après Dortmund. Et cela tombe bien car de banc et de foire, il en a justement été question vendredi à Köln.

Wieder erstklassig !

Lorsqu’il a retrouvé la Coupe d’Europe après plus de deux décennies d’abstinence, en mai 2017, le 1. FC Köln pensait pouvoir durablement retrouver la place qui est la sienne dans la première moitié du classement de Bundesliga. Mais il y a eu cette catastrophe industrielle de la saison 2017-2018 avec une relégation largement évitable compte tenu de l’effectif à disposition. Mais c’est souvent comme ça en Buli : quand tu t’embarques dans une spirale négative en début de saison, il est compliqué d’inverser la dynamique. Mais, contrairement aux relégations précédentes, il n’y a cette fois pas eu de psychodrame, de règlements de compte ni de révolution. Certes, l’entraîneur Peter Stöger et le manager Jörg Schmadtke, principaux artisans de redressement du Effzeh après la relégation de 2012, ont dû partir mais sinon le club est resté relativement solide sur ses bases et serein. Les Geißböcke ont notamment pu compter sur les deux figures emblématiques que sont le gardien Timo Horn et l’international Jonas Hector, qui ont choisi d’accompagner leur club de cœur en Zweite Liga plutôt qu’accepter les offres des plus grands clubs d’Allemagne qui les convoitaient. C’est essentiel de pouvoir compter sur de tels tauliers pour crédibiliser un projet. Et pour réussir le retour immédiat en Bundesliga, malgré une petite crise au printemps qui a coûté sa place à l’entraîneur Marcus Anfang. Mais l’entraîneur des M21 a fini le travail et, après une année d’absence, le Müngersdorfer Stadion retrouve la Bundesliga à l’occasion de ce match contre le Borussia Dortmund.

Köln est magique (sauf l’Aachener Straße)

Comme je suis très heureux de retrouver Köln, je débarque dans la Domstadt un peu en avance, histoire d’aller flâner entre le Dom, le Rathaus et le Rheinufer. Il fait 30°, les rives du Rhin sont bondées et les fans des deux camps se mélangent joyeusement sur les terrasses. Tout le monde se souhaite bonne chance, lorsque je m’arrête sur une terrasse d’Heumarkt pour une bière, plusieurs Kölner viennent spontanément me souhaiter une bonne saison et m’expliquer qu’ils veulent voir le BVB champion. C’est tellement agréable, le football, dans cette ambiance de convivialité et d’amitié.

Ce qui est moins agréable, comme toujours à Köln, c’est le trajet en tram jusqu’au stade le long de l’interminable Aachener Straße : la voie est en site partagé, le tram s’arrête à chaque feu rouge, et à chaque arrêt, des fans tentent de monter dans des wagons déjà surbondés. Mais, enfin, après une demi-heure de sauna, nous arrivons, non pas au stade, mais à l’arrêt précédent, l’Alter Militärring, là où se trouvent la plupart des Biergarten du Müngersdorf. Et donc là où commence obligatoirement un match à Köln. A nouveau, l’ambiance est festive et amicale entre les fans des deux camps, la Kölsch coule à flot, la soirée est très bien partie.

Un avertissement non retenu

L’ambiance est complètement survoltée pour ce retour des Geißböcke en Bundesliga dans leur antre du Müngersdorfer Stadion. Même en Gästeblock, nous écoutons dans un silence quasi-religieux le Mer Stonn zo dir FC Kölle. Avec l’hymne du Effzeh puis le Eisern Union de l’Alte Försterei la semaine suivante, nous vivons sans doute la semaine la plus faste de la saison en terme de Vereinshymne avec probablement les deux plus beaux chants de supporters d’Allemagne en l’espace de huit jours. Ce qui est moins faste, c’est la première mi-temps de nos Jungs. Le nouvel entraîneur du Effzeh, Achim Beierlorzer, l’avait prévenu : pas question pour le néo-promu d’adopter une attitude passive comme Augsburg la semaine précédente, Köln voulait aller presser et partir au combat contre le grand BVB. Lucien Favre en était conscient, il avait dit en conférence de presse qu’il s’attendait à un pressing brutal et intense des Kölner. Nul doute qu’il avait averti ses joueurs du danger mais l’avertissement a dû tomber dans l’oreille de quelques sourds car, en première mi-temps, le BVB est complètement dominé dans les duels par les Domstädter. Le pressing des Geißböcke nous empêche de développer notre jeu, la bataille du milieu de terrain est complètement gagnée par les Kölner et les ballons perdus à mi-terrain constituent une menace permanente pour notre défense. En première mi-temps, le BVB ne réussit rien ou presque, une seule occasion, un coup-franc de Marco Reus, détourné par le gardien Horn.

Comme un air de déjà-vu

La saison dernière, le Borussia a été excellent contre les meilleures équipes de Bundesliga. Nous avons réussi 31 points sur 36 possibles contre les six autres équipes qualifiées en Coupe d’Europe : 6 points sur 6 contre Leipzig, 6/6 contre Leverkusen, 6/6 contre Mönchengladbach, 6/6 contre Wolfsburg, les seuls points perdus l’ont été lors du nul à Francfort (4/6) et du naufrage à Munich (3/6). En revanche, nous avons perdu cinq points en deux déplacements chez les néo-promus Düsseldorf (2-1) et Nürnberg (0-0). Et cinq points sur le terrain du futur relégué Hanovre (0-0) et du longtemps relégable Augsburg (2-1). Cela fait donc cinq points perdus en douze matchs contre les meilleures équipes de Bundesliga mais dix points égarés en seulement quatre déplacements sur le terrain des cancres de la ligue. Lors de ces quatre matchs, nous avions chaque fois eu la même impression, celle d’un BVB un peu suffisant qui n’était pas entré dans son match avec toute l’agressivité voulue ou y était entré trop tardivement. Si l’on veut être champion cette année, c’est un point à corriger absolument : la Bundesliga, c’est une succession de  34 combats et l’on ne peut aborder aucun match en jouant à 90% de nos capacités, même contre un néo-promu. Mais, au vu de notre première mi-temps à Cologne, la leçon n’a pas encore été retenue.

Première mi-temps à oublier

Car la première mi-temps a été nettement dominée par les Kölner. Après un centre manqué de justesse par Cordoba, c’est logiquement que les locaux vont ouvrir la marque sur un corner dévié au premier poteau et repris au second d’une tête plongeante par Dominick Drexler qui s’offrait là son premier but en Bundesliga. J’aime beaucoup le Kölle Alaaf mais je préfère l’entendre au Karneval qu’après avoir encaissé un but… Et on aurait pu entendre plus d’une fois le mythique Torhymne du Effzeh avant la pause, on pense notamment à ce dribble raté, heureusement sans conséquence, du revenant Roman Bürki devant Cordoba. Plus jamais ça, Roman… Bref, à la pause, nous n’en menions pas large, tant notre BVB paraissait submergé par la saine agressivité et l’enthousiasme du Effzeh.

Le banc et Brandt

Heureusement, après la pause, le BVB est revenu avec plus d’allant. Et puis, physiquement, Köln n’a pas tenu la distance. Le pressing colonais a commencé à diminuer d’intensité et notre jeu s’est peu à peu mis en place. Marco Reus place une première banderille, arrêtée par Timo Horn. On connaît encore une frayeur sur un but d’Anthony Modeste mais l’attaquant français était largement hors-jeu et le but justement annulé. Ce match nous a rappelé ceux disputés l’automne dernier contre Leipzig et à Leverkusen, où nous avions longtemps été submergés par le pressing adverse mais où nous avions pu retourner la situation lorsque l’adversaire a commencé à faiblir physiquement. Lucien Favre l’a bien senti et il a la chance de disposer d’un banc extrêmement fourni qui lui permet d’introduire des nouvelles armes offensives quand l’équipe adverse montre des signes de fatigue. A l’heure de jeu, notre entraîneur choisit d’introduire Julian Brandt et Achraf Hakimi en passant du 4-2-3-1 au 4-1-4-1. Un coaching gagnant.

L’astuce

Il ne restait que 20 minutes à jouer lorsqu’une petite astuce nous permet d’égaliser : sur un corner rapidement joué, Thorgan Hazard glisse le ballon à Jadon Sancho qui s’avance au milieu d’une défense encore en train de se replacer et envoie une frappe imparable au deuxième poteau. Autant l’attitude un peu passive de nos Jungs en première mi-temps nous a déplu, autant nous avons aimé leur attitude conquérante et les poings rageurs devant nous en Gästeblock après l’égalisation. Le message était limpide : malgré cette première mi-temps ratée, pas question de se contenter du match nul, il y a encore le temps pour aller chercher la victoire. L’ambiance est géniale, entre des Kölner qui font bloc derrière leur équipe, laquelle s’accroche courageusement à cette parité après avoir longtemps cru à la victoire, et des Borussen qui poussent leurs Jungs, enfin dans leur match, vers la victoire. C’est pour ce genre d’ambiances qu’on adore la Bundesliga !

Les jokers

Et c’est finalement notre banc qui va faire la différence. Julian Brandt décale Lukasz Piszczek, le centre de notre vice-capitaine trouve Achraf Hakimi dont l’élévation impressionnante ne laisse aucune chance aux deux défenseurs colonais pour fusiller Timo Horn à bout portant de la tête. 1-2, nous jouions la 86e, que ce fut long mais c’est enfin l’explosion en Gästeblock. Les Geißböcke se ruent alors à l’attaque mais, après avoir tant donné, la lucidité n’y est plus et Jadon Sancho et l’inévitable Paco Alcacer partent en contre sceller le score à 1-3 à la fin des arrêts de jeu. Un score complètement inespéré vingt-cinq minutes plus tôt alors que nos Jungs séchaient face au pressing adverse. C’est un peu cruel pour les Domstädter mais la qualité supérieure de notre effectif et en particulier de notre banc a fait la différence. Ceci dit, Köln est sans doute le meilleur des trois promus et devrait pouvoir assurer sans trop de problème son maintien. A condition de ne pas s’enferrer dans une spirale négative en raison de son calendrier infernal du début de saison : un déplacement  à Wolfsburg, puis Dortmund, le déplacement chez sa bête noire Freiburg, le Derby contre Mönchengladbach et le Bayern, il y a mieux pour se mettre en confiance en début de saison.

Un avertissement sans frais

Ceci dit, même si on a eu un plaisir fou en fin de match et qu’on a vécu beaucoup d’émotions, c’est le genre de prestation à ne pas répéter trop souvent. Plus tard dans la saison, quand notre banc sera moins fourni en raison des blessures qui ne manqueront pas de survenir et que nous ne pourrons plus prendre le même ascendant physique sur l’adversaire en ayant joué trois jours plus tôt en Coupe d’Europe, une première mi-temps aussi poussive ne pardonnera plus. Mais on ne va pas bouder notre plaisir : onze matchs depuis le début de la préparation, onze victoires, la première place du classement, une ambiance magnifique, une victoire certes longue à se dessiner mais finalement riche en émotions, une superbe soirée de football et des Kölsch en veux tu, en voilà, la fête continue ! Prochaine étape : Union Berlin et sa mythique Alte Försterei, une autre ambiance de feu en perspective, un autre néo-promu qui nous attend de pied ferme même s’il devrait jouer de manière un peu plus défensive que Köln ; cette fois-ci il faudra être prêts à aller au combat dès la première minute et ne pas attendre que notre banc fasse la différence pour que la foire se poursuive jusqu’à la trêve internationale.

Catégories : Au Stade

2 commentaires

Schaeffer Thierry Paul · 31/08/2019 à 06:40

Merci agréable lecture que je découvre! Je suis de Genolier en Suisse!
Eu la chance de serrer la main à Favre ferme et fine! Une délicieuse personne et de parole
Fan et donc du Borussia
Me réjouis de suivre vos articles suivant

    Julien Mouquin · 07/09/2019 à 10:18

    Je suis Vaudois aussi, d’Echallens. Fan et abonné du BVB de longue date mais j’ai bien entendu été ravi le jour où un concitoyen que je connais bien est venu entraîner mon club favori. J’espère que ça va marcher !

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