Depuis le début de la saison, j’ai souvent eu l’occasion de te relater des week-ends de rêves, avec de la joie, des bières, des ambiances de feu, du spectacle, des émotions et des victoires du BVB. Mais le football, ce n’est malheureusement pas toujours comme cela : il y a aussi parfois des jours où tu vas trouver au moins onze bonnes raisons de détester ton sport favori. Ce qui ne nous empêchera pas d’être au stade le week-end prochain.  

1)      L’accueil à l’Arroganz Arena

Nous partîmes de bon matin et, par un prompt renfort, notre car afficha rapidement complet. Nous avions prévu de la marge car l’arrivée à Munich est souvent synonyme d’embouteillages. Mais, en ce samedi ensoleillé, la circulation était fluide et c’est quatre heures avant le coup d’envoi que nous nous présentons avec notre joyeuse équipée devant l’Allianz Arena. Problème : le parking réservé aux bus adverses est en chantier. A priori, on y construit des étages de parkings. Ce stade est tellement en dehors de toute civilisation qu’il est fortement conseillé de s’y rendre en voiture et Uli Hoeness a sûrement fait le calcul que des parkings supplémentaires étaient un bon moyen de tondre un peu plus les clients fortunés qui garnissent son stade.

Et tant pis pour les fans adverses : on renvoie notre bus en direction de la Säbener Straße, la siège du Bayern Munich, en nous demandant d’attendre une heure coincé devant le grillage d’une caserne qu’on daigne venir nous chercher. Finalement, une voiture de police vient escorter notre bus pour revenir au stade. Et on nous explique que, même en cas de victoire, pas question de fêter avec nos Jungs : des bus nous attendront dès le coup de sifflet de final pour nous ramener à notre car parqué dans la banlieue glauque où le Bayern a son siège. Super accueil. Et nous n’étions pas au bout de nos peines : la fouille est interminable, faute de sécurité en suffisance. Une fois franchie la fouille, dans tous les stades d’Allemagne, le contrôle des billets est une formalité. Sauf à Munich : une nouvelle file interminable nous attend pour passer aux tourniquets des billets puisque seuls…trois avaient été installés pour les quelques 8’000 fans adverses. Sans doute par mesure d’économie : il n’y a pas de petit profit dans le tiroir-caisse géant d’Uli Hoeness. Bref, entre notre première arrivée avec le bus devant l’Arroganz Arena et notre entrée au stade, à peine 300 mètres plus loin, il s’est écoulé plus de trois heures ! Super accueil… Je ne sais pas comment les fans adverses sont accueillis chez nous mais je n’ai jamais entendu dire qu’on leur réservait pareil traitement. Mais j’aurai honte que notre club se permette de faire patienter nos invités aussi longtemps, le foot allemand doit être une fête et il est une presque toujours fête. Sauf à Munich.

2)      Un stade en mode supermarché

Une fois enfin entré dans le stade, ce n’est guère plus joyeux. Consigne compris, une infecte Paulaner à 2,5‰ est facturée 6,30€ contre 3,90€ pour une délicieuse Brinkhoff’s Nr.1 au Westfalenstadion. Quand à la Currywurst, il faut chercher les deux ou trois malheureuses rondelles de saucisses noyées au fond d’une sauce rouge insipide. Il n’y a décidemment pas de petite économies à Munich. Bon, de toute façon, c’est le seul et unique stade d’Allemagne où il est interdit d’emmener nourriture et boissons en gradins. Pour les supporters adverses uniquement, bien sûr, discrimination supplémentaire. En montant dans le bloc réservé aux fans dortmundois, on se fait insulter par une cliente du Bayern qui n’avait pourtant rien à faire là. On lui souhaite poliment un bon match : après tout il faut comprendre qu’ils soient un peu agressifs de devoir assister toutes les deux semaines à un match dans ce truc sinistre, elle répond par un doigt d’honneur. Vraiment, on sait soigner l’accueil à Munich.

3)      Une ambiance d’enterrement

On ne tire pas sur une ambulance mais l’ambiance est comme d’habitude insignifiante. La Schickeria, le principal groupe ultra du Bayern, est consciente du problème et a installé un mégaphone pour tenter d’amplifier les chants feutrés qui s’élèvent de la minuscule Sudkürve, en vain. Même avec des mégaphones, même avec un scénario de match très favorable pour eux, le combat en tribunes était trop inégal : 8’000 Borussen contre 67’000 clients avachis et blasés du Bayern, on n’a entendu que nous, même à 4-0. En face, à part les quelques provocations habituelles une fois le match plié et taper deux ou trois fois dans les mains, c’étant le néant habituel. Cela doit faire plaisir de gagner des titres dans cette ambiance-là… Nous étions en tous les cas loin de la grande fête du football allemand.

4)      L’occasion ratée de Mo Dahoud

Le match aurait-il pu prendre une tournure radicalement différente si Mahmoud Dahoud avait transformé son immense occasion du début de match ? On ne le saura jamais mais au moins il y aurait eu un match. Car la première occasion fut dortmundoise. Bon, ce fut aussi la seule en notre faveur pour être franc. Mais quelle occasion : après une superbe combinaison entre Marco Reus et Jacob Bruun Larsen sur le flanc gauche, notre capitaine offre un caviar à Mo Dahoud mais notre Germano-Syrien, alors qu’il avait le but ouvert devant lui, ouvre trop son pied et sa reprise vient heurter la base extérieure du poteau. Le genre d’occasions à ne jamais rater dans ce genre de match. Et nous n’allons pas tarder à en faire l’amère expérience.

5)      Le coaching de Lucien Favre

Forcément, l’occasion ratée par Dahoud interroge sur le coaching de Lucien Favre. La tâche de notre entraîneur n’était pas facilitée par les absences de Pulisic, Hakimi, Guerreiro et Alcacer. Il y avait notamment une interrogation sur les postes de latéraux : finalement le choix s’est porté sur Piszczek, qui n’avait pas rejoué depuis neuf semaines et dont le retour n’était pas prévu aussi tôt, et Diallo, pourtant insuffisamment remis de sa blessure contre Wolfsburg et qui à la base ne devait même pas être du voyage. Pas idéal pour un Giganten-Gipfel. Mais aurait-on fait mieux avec Wolf et Schmelzer, les autres options à disposition ? Pas certain. La titularisation de Dahoud pose plus de questions. On a été surpris de ne pas voir Mario Götze qui revient en bonne forme et qui est l’un des rares joueurs de l’effectif à avoir l’expérience de ce type de match, il en avait même été le héros dans ce même stade en novembre 2011. En plus, la titularisation de Dahoud a contraint Marco Reus à évoluer en pointe, où il n’a jamais vraiment été à l’aise. Notre capitaine aurait sans doute été plus à l’aise au cœur du jeu pour tenter de remonter son équipe qu’isolé en pointe, frustré d’attendre de ballons qui ne sont jamais venus. Après, notre entraîneur côtoie ses joueurs tous les jours à l’entraînement, il a fait son choix mais l’expérience nous a montré que c’était rarement payant de tenter un coup de poker sur ce type de match et sur le coup le pari a été bien perdu.

6)      Les balles arrêtées

Depuis le début de la saison, notre équipe gère mieux les balles arrêtées offensives que lors des exercices précédents. En revanche, nous restons trop vulnérables sur les balles arrêtées défensives. Et une fois de plus c’est un corner qui va précipiter la chute. Il y avait déjà eu une première alerte après 2 minutes sur une tête trop décroisée de Mats Hummels. La deuxième tentative fut la bonne pour notre ancien capitaine. 1-0 au lieu de 0-1 sur l’action manquée de Dahoud, forcément c’est un tout autre match qui débutait. C’est vraiment compliqué de gagner des matchs quand on s’inflige régulièrement un handicap sur balles arrêtées. Et ce n’est de loin pas la seule fois de la soirée où Hummels a pu placer sa tête sur balles arrêtées.

7)      L’erreur de Zagadou

Dès le premier but, notre BVB a cessé d’exister. Les actions ont déferlé à un rythme soutenu en direction de notre goal. On espérait laisser passer l’orage grâce aux prouesses de Bürki mais cela n’a pas tenu vingt minutes avant d’encaisser le 2-0. Un authentique cadeau. Sur un ballon sans danger, Dan-Axel Zagadou offre la balle à Robert Lewandowski qui n’a pas pour habitude de manquer pareille aubaine. Bien sûr notre équipe est jeune : n’oublions pas que Zagadou n’a que 19 ans et qu’il dispute sa première vraie saison comme titulaire dans l’axe. Et encore, il avait entamé le championnat comme numéro 3 voire 4 dans la hiérarchie de nos défenseurs centraux. Et à côté de lui, ce n’est pas franchement un vieux briscard mais Manuel Akanji, qui lui aussi dispute sa première saison comme patron de la défense et qui a de surcroît été freiné par une blessure. Hummels et Subotic avaient, eux, disputé plus de deux saisons ensemble, dans une équipe qui ne jouait pas les premières places et où ils avaient eu le temps de faire leurs expériences et leurs boulettes, avant de devenir la meilleure paire de défense centrale de Bundesliga. Là, on demande à nos Jungs d’assumer beaucoup plus jeune et avec beaucoup moins de vécu la pression de ce type de matchs au sommet. Avec en face des mecs qui ont une immense expérience et qui ont déjà joué des dizaines de matchs couperet comme celui-là. C’est comme cela que l’on apprend paraît-il… Il n’empêche : cette erreur-là était largement évitable, même en manquant d’expérience on ne devrait pas prendre de tels risques. Car à 2-0, le match était plié.

8)      Le naufrage collectif

Ceci dit, il serait faux de faire porter la responsabilité de la défaite à Dahoud ou Zagadou, c’est toute l’équipe qui est passée au travers à Munich. A l’exception de Roman Bürki, qui a multiplié les parades pour tenter, d’abord, de nous maintenir dans le match, puis d’encaisser une rouste historique. Quand tu perds 5-0 et que ton gardien est de très loin ton meilleur joueur, il n’y a pas besoin de faire beaucoup plus de théories pour illustrer l’ampleur de la débâcle. La défense a pris l’eau de toute part, nos guerriers du milieu de terrain Witsel et Delaney ont été dépassés dans les duels et nos joueurs offensifs, Sancho et Reus en tête, n’ont jamais paru capable de donner le signal d’une quelconque révolte. Cela rappelle la deuxième mi-temps à Tottenham où notre équipe avait sombré corps et âme après l’ouverture du score londonienne. Cette fois, le premier but est tombé bien plus tôt et notre équipe a complètement disparu de la circulation. Comme désemparée, absolument pas préparée au coup de sort, pourtant loin d’être imprévisible, d’un but adverse. Mentalement, nos Jungs ne sont pas encore prêts à disputer ce genre de matchs de très haut niveau, avec beaucoup de pression et un adversaire qui vient nous chercher très haut avec beaucoup d’intensité. Les buts se sont enchaînés comme des fruits mûrs, 4-0 à la pause, avant une deuxième période d’un ennui total, dans une ambiance d’enterrement, avec un Bayern en mode gestion et un Borussia qui semblait seulement attendre le coup de sifflet final. Cela se soldera sur un score de 5-0 après une dernière réussite pour l’anecdote et cela reflète somme toute la différence qu’il y avait samedi entre les deux équipes.

9)      Les limites du mode survie

Bien sûr, on rêvait d’un autre scénario mais ce naufrage n’arrive pas non plus complètement par hasard. Jusqu’en novembre, notre BVB avait paru aller crescendo avec une équipe qui semblait progresser de match en match, tant collectivement qu’individuellement. Mais depuis novembre, c’est beaucoup plus laborieux. Il y a eu les blessures, qui ont contraint à de nombreux ajustement dans l’équipe type, un jeu beaucoup moins fluide et devenu trop prévisible à contrer, la pression de cette première place complètement inattendue, une équipe moins dominatrice physiquement qu’en début de saison… Je l’ai souvent souligné ces dernière semaines: nous évoluions en mode survivants ou rescapés : on compensait par une attitude de guerriers, admirable certes, nos insuffisances dans le jeu. Sauf que ce qui peut passer contre Stuttgart, Berlin ou Wolfsburg, ne pardonne pas contre le Bayern. A Munich, nous n’avons pas eu le temps d’actionner le mode survie que nous étions déjà noyés.

10)   Le retard au classement

Pour la première fois depuis le début de l’automne, nous sommes en retard au classement. Pas seulement à la différence de but mais aussi aux points. Un point. A la fois peu et beaucoup. Beaucoup parce que nous ne sommes plus maîtres de notre destin et que ce Bayern-là, qui reste sur 14 victoires en 16 matchs de Bundesliga, est tout à fait capable de gagner ses six dernières rencontres. Sans compter qu’avec notre qualité de jeu actuelle, nous sommes très loin de pouvoir assurer le carton plein sur la fin. Mais d’un autre côté, il suffit d’un faux-pas, toujours possible du Rekordmeister, pour que le momentum revienne de notre côté. Il ne faut plus trop se préoccuper d’eux et tenter de gagner nos matchs. Notre saison est déjà réussie et elle le sera au-delà de toute espérance si nous parvenons à remporter un deuxième Derbysieg le 27 avril prochain. Nous n’avons donc plus rien à perdre : essayons de gagner nos matchs et nous ne sommes pas à l’abri d’une bonne surprise. Après tout, en 2001-2002, nous avions sombré 4-0 dans le Spitzenspiel de la 24ème journée à Leverkusen et compté jusqu’à cinq points de retard sur Neverkusen à trois journées de la fin. Mais nous avions quand même décroché le Meisterschale en fin de saison…

11)   Les critiques

Le match n’était pas terminé que déjà les critiques acerbes et le plus souvent infondées pleuvaient sur nos Jungs, le staff, les dirigeants… On passera sur les élucubrations d’un tabloïd berlinois qui commence à tout remettre en question ce qui a été réussi depuis le début de la saison. Il y a douze mois, au même stade du championnat, nous accusions 21 points de retard sur le Rekordmeister, nous sommes à 1 point et on entend déjà parler de « honte », « stratégie ratée », « changement d’entraîneur » et autres absurdités. Bien sûr, nous sommes déçus par la performance de samedi. Quand on se lève à 5h du matin, qu’on fait deux fois neuf heures de trajet et qu’on est de retour à la maison le dimanche matin à 8h après vingt-sept heures de périple sans sommeil (et une halte dans un bar à Berne pour attendre le premier train du matin), c’est en espérant un autre spectacle.

Mais tous nos chants, nos devises, notre histoire nous enseignent qu’être fan du BVB, c’est dans les bons comme dans les mauvais moments. On a le droit de ne pas partager ces valeurs mais, à ce moment-là, on change de club et on devient fan d’une de ces machines commerciales qui achètent chaque année des titres sans émotion à coup de millions.

Heureusement, les 8’000 Borussen présents à Munich ont donné l’exemple en encourageant leurs Jungs jusqu’au bout, même si je dois avouer qu’on a un peu baissé le rythme en deuxième mi-temps devant le spectacle indigent et l’absence de suspense et d’intensité. Mais ce qui me fait honte, bien davantage que la performance de nos Jungs, ce sont ces déchets qui se prétendent fan de notre club mais vomissent dessus au premier écueil. Mais qui seront les premiers à venir se faire mousser au Westfalenstadion avec des billets à 300€ au marché noir si, par un miraculeux retour de situation, nous jouons le Meisterschale dans cinq semaines contre Düsseldorf.

Une bonne raison d’espérer : nous sommes le BVB !

Ok, ce déplacement de Munich a tourné, comme souvent, au cauchemar, et alors ? Il nous reste six matchs à vivre avant l’interminable pause estivale. Six matchs cette fois-ci dans des endroits qui respirent le foot, la passion, la bière et pas seulement le pognon, l’arrogance et le bling-bling. Trois fois le Westfalenstadion, dont le match le plus attendu de la saison, le Derby, trois déplacements sympathiques à Freiburg, Brême et Mönchengladbach. On se réjouit de vivre ces moments avec cette équipe qui nous a donné tellement de joies, d’émotions et d’espoirs cette saison, on va continuer à la soutenir jusqu’au bout, quoiqu’il advienne. Nous sommes le BVB et ce qui nous lie à notre club favori est beaucoup plus précieux qu’une victoire ou une défaite, un titre perdu ou gagné ! Dortmund, Dortmund, Und wir werden immer Borussen sein, es gibt nie nie nie einen anderen Verein !

Catégories : Au Stade

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