Après une première saison convaincante au BVB, Jürgen Klopp connaît un automne 2009 difficile. Les défaites s’enchaînent, le Borussia connaît son pire début de saison depuis 24 ans et de nombreuses voix s’élèvent pour demander le départ de cet entraîneur charismatique mais incapable de faire progresser son équipe. Heureusement, Hans-Joachim Watzke et Michael Zorc n’ont pas écouté les impatients et sont restés fidèles à leur ligne de conduite. La clé de nos succès futurs !
A l’été 2009, le Borussia Dortmund décide de laisser partir son buteur Alexander Frei. Alex ne s’est jamais vraiment plu dans le système de Jürgen Klopp et il estimait qu’à 30 ans, il était temps pour lui de gagner des titres et de jouer la Ligue des Champions, choses qui paraissaient impensables au BVB à l’époque, avec son club d’origine, le FC Bâle. Pour remplacer l’ancien meilleur buteur du championnat de France et idole du Westfalenstadion, les dirigeants décident d’investir sur la Pantera argentine Lucas Barrios, un joueur refusé quelques mois plus tôt par l’AS Nancy-Lorraine… Sinon, le club recrute avec ses moyens, peu élevés, en Zweite Liga, l’enfant de la Südtribüne, Kevin Großkreutz, et Sven Bender. Manni se souvient de son engagement au BVB : « J’étais en voiture. Klopp m’a appelé, le réseau passait mal mais nous avons essayé quatre fois. Je savais déjà que Dortmund était intéressé mais le moment où l’entraîneur m’appelle et clarifie a été décisif. Pour moi, c’était cool de l’avoir au téléphone, jusque-là je ne l’avais vu qu’à la télévision. Il était aussi direct qu’à la TV. C’était une discussion agréable et sympa. C’était décisif pour mon choix. Il aimait mon style de jeu, il serait intéressant pour un jeune comme moi de venir dans un top-club comme Dortmund, qu’il me décrivait comme un club fantastique. »
Car Jürgen Klopp ne voulait engager que des joueurs avec lesquels il avait envie de travailler : « A Dortmund, il a eu la chance de former une équipe pratiquement depuis le début pour mettre en place sa vision », résume Neven Subotic. Sauf qu’en début de saison 2009-2010, la méthode Klopp ne fonctionne pas. Le BVB débute sa saison par trois matchs nuls et surtout trois affreuses défaites à domicile, 1-4 contre Hambourg, 1-5 contre le Bayern et, pire que tout, 0-1 dans le Derby contre Schalke, avec un arbitrage très défavorable. C’est tout simplement le pire début de saison du club depuis 24 ans ! Un mois avant de fêter le centième anniversaire du club, le BVB est quinzième du classement, aux portes de la relégation. La réussite fuit les joueurs, la confiance n’est plus là et le spectacle est souvent pathétique comme lors de ce triste 0-0 contre Mainz auquel nous avons le privilège d’assister. Après la défaite contre Schalke, une centaine d’ultras attendent les joueurs au centre d’entraînement pour leur réclamer des comptes. Le chef de presse Josez Schneck décrit la scène : « Klopp est sorti du bus de l’équipe et a dit : « ok Jungs, racontez-moi » et il a discuté avec eux. La plupart disaient : « vous n’êtes pas des Borussen, vous n’avez pas combattu », le genre de discours habituels. Et, en un quart d’heure, Klopp leur a montré que ce n’était pas le chemin à suivre. Et qu’il prenait bien les suggestions et les préoccupations des fans très au sérieux. Ils sont rentrés à la maison en paix et avec un merci beaucoup. Il y a d’autres entraîneurs qui n’auraient jamais voulu avoir affaire à eux. » Nobby Dickel corrobore : « Il parlait la langue des fans. Nous avions beaucoup d’entraîneurs qui disaient « aujourd’hui notre transition entre la défense et le milieu, entre le milieu et l’attaque n’a pas fonctionné » ou bien « c’est un problème de décalage » etc. Personne ne veut entendre cela dans le Ruhrpott. Jürgen disait : « aujourd’hui nous avons fait de le merde et nous avons mérité de perdre. » Avec cela chacun peut vivre. »
Mais les médias sont encore plus difficiles à calmer que les fans. Avant un match de Pokal en octobre à Osnabrück, la Berliner Zeitung met en doute la capacité de Jürgen Klopp à faire progresser le Borussia : « Une élimination signifierait la porte. Klopp peut faire grandir un petit club, il l’a prouvé à Mainz, mais s’il peut rendre à nouveau sa gloire à un grand club, cala reste douteux. En tous les cas, cette saison peut de ce point de vue pour le Borussia Dortmund déjà être considérée comme perdue. » Le soir même, le BVB s’incline 3-2 en huitième de finale de la DFB-Pokal sur la pelouse du VfL Osnabrück, pensionnaire de troisième division…
Et pourtant Klopp continue à croire à son bonne étoile ; pour lui, la série noire de l’automne est un dommage collatéral de l’assimilation par une jeune équipe d’un système qui exige une implication à 100% et une mise en place détaillée : « tous les jours se ressemblent dans la crise, la compétence des gens est très vite remise en cause. Mais nous pouvons nous en sortir, j’en suis absolument convaincu. » A ce moment-là, il n’y a sans doute qu’une seule personne au monde à croire que cet ancien joueur et ancien entraîneur de Zweite Liga peut vraiment ramener le BVB sur le chemin du succès. Mais cela tombe bien, cet homme, c’est celui à qui appartenait la décision soit de maintenir sa confiance à Jürgen Klopp soit de lui montrer la porte de sortie que réclamaient à hauts cris les médias et certains fans ou prétendus fans : le directeur général Hans-Joachim Watzke. Aki déclarait alors : « Personne au sein du club n’a le moindre doute que cela ira mieux, zéro virgule zéro doute. » L’Histoire lui a donné raison : quinze mois plus tard, l’entraîneur le plus décrié et le plus critiqué d’Allemagne, celui dont beaucoup voulait le départ, célébrera le Meisterschale devant 450’000 fans en liesse dans les rues de Dortmund…
1er décembre : Revolution 09
2 décembre : Une défaite salutaire
3 décembre: Un rendez-vous presque manqué
4 décembre: A la conquête des cœurs
5 décembre: Goldene Zukunft braucht Vergangenheit
6 décembre: Un employé comme les autres
7 décembre: L’apprentissage
8 décembre: Le premier Derby
9 décembre: La désillusion
Adaptation libre de « Ich mag, wenn’s kracht » Jürgen Klopp. Die Biographie. De Raphael Honigstein, éd. Ullstein extra, 2017.
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