En pleine dégringolade dans la hiérarchie du football allemand, le Werder Brême est devenu le Lieblingsgegner du Borussia Dortmund, soit le club qui réussit le mieux en Bundesliga au BVB. La tradition a été respectée samedi : le Borussia a une nouvelle fois martyrisé le Werder dans son Weserstadion, s’est rassuré et a retrouvé le chemin des filets. Y compris Robert Lewandowski, Henrikh Mkhitaryan et Manuel Friedrich !

Dans la première décennie du XXIème siècle, le Werder Brême était considéré comme la deuxième puissance du football allemand, celle qui semblait la plus à même de contrecarrer sur la durée la suprématie du Bayern Munich, avec un titre en 2004, une deuxième place en 2006 et 2008 et une troisième en 2005, 2007 et 2010. Sauf que le Rekordmeister ne souffre pas d’une concurrence trop aigüe et, dès qu’un club menace un peu trop son hégémonie, il va le dépouiller de ses meilleurs éléments grâce à sa puissance économique supérieure. Leverkusen, vice-champion d’Europe en 2002, en a fait l’expérience (Lucio, Ballack, Zé Roberto), tout comme le Stuttgart champion d’Allemagne en 2007 (Gomez), le Schalke demi-finaliste de la C1 2011 (Neuer) et donc le Werder Brême (Ismaël, Borowski, Klose, Pizarro). Aujourd’hui, c’est au tour du Borussia Dortmund (Götze, Lewandowski) d’être victime du pillage bavarois et on espère que les dirigeants jaunes et noirs auront mis à profit ce passage sur les bords de la Weser pour bien examiner la situation du Werder et éviter de commettre les mêmes erreurs que les dirigeants brêmois lorsqu’ils avaient eux aussi subi les assauts furieux du Bayern.

 

Les caisses sont vides

Car les agressions bavaroises ne sont pas la seule cause de la déchéance des Werderaner. Non retenue pour la Coupe du Monde, Brême a trop tardé pour entreprendre une rénovation de son stade onéreuse mais qui n’a permis d’augmenter ni la capacité ni la rentabilité du Weserstadion. Pendant longtemps, le Werder a boosté ses revenus modestes en jouant régulièrement la Ligue des Champions et en revendant à prix d’or des joueurs achetés une bouchée de pain qui s’étaient révélé dans la Cité Libre. Mais, depuis quelques années, le Werder ne joue plus la Coupe d’Europe que sur Playstation et a perdu son flair en matière de transferts, cumulant les flops depuis le départ d’un certain Mesut Özil. Ajoute à cela l’usure du duo Thomas Schaaf /Klaus Allofs dont le règne s’est achevé au printemps dernier en queue de poisson après quatorze ans de bons et loyaux services et tu comprendras pourquoi, en peu de temps, Brême est passé du statut de ténor de la Bundesliga à celui de candidat à la relégation.

Lieblingsgegner

Corollaire : alors que durant des années, le Borussia Dortmund avait tout à craindre du déplacement du Weserstadion, c’est devenu depuis quelques saisons une destination hospitalière, pas seulement à cause de l’excellente Haake-Beck, mais parce que le Borussia y a signé une série de victoires relativement aisées, la dernière en date 5-0 en janvier 2013, faisant du Werder son adversaire préféré en Bundesliga. Ceci dit, vu les dernières sorties mitigées de mon club favori, c’est sans triomphalisme excessif que l’on débarque dans la ville hanséatique. Surtout que, pour une fois, je n’ai pu obtenir de places dans le Gästeblock mais me retrouve à côté de la Prostkurve des supporters locaux. Cela ne m’empêche pas d’arborer un maillot floqué Hummels, gants, bonnet et écharpe du BVB. Sans m’attirer la moindre remontrance du service de sécurité, ni la moindre animosité des fans brêmois malgré quelques manifestations de joie démonstratives ni avoir besoin d’aller me réfugier en pleurnichant dans le parcage visiteurs.

On a retrouvé le vrai BVB

Depuis deux mois, on avait un peu perdu ce jeu dynamique, rapide et vertical qui avait fait la force du Borussia Dortmund, on va rapidement le retrouver sur la pelouse du Weserstadion. Brême était sans doute l’adversaire idéal pour cela. Pourtant, le nouvel entraîneur Robin Dutt était censé apporter cette rigueur défensive que ne permettait pas le football très offensif prôné par son prédécesseur Thomas Schaaf. Mais on n’oublie pas quatorze ans de folklore défensif aussi rapidement et, après une imperméabilité encourageante en tout début de saison, le Werder est vite retombé dans ses travers, laissant beaucoup trop d’espaces à l’adversaire. Les Borussen vont s’engouffrer dans la brèche et, après deux escarmouches signées Reus et Bender, vont trouver la faille sur une subtile frappe enroulée de Robert Lewandowski. Après la traditionnelle et inquiétante frayeur sur balle arrêtée (tête de Prödl au-dessus), le BVB va doubler la mise sur un magnifique solo signé Henrikh Mkhitaryan ponctué d’une frappe sèche et précise.

Improbable

Les derniers espoirs brêmois seront anéantis dès la reprise sur un corner de Marco Reus propulsé au bon endroit par l’improbable Manuel Friedrich, le chômeur engagé en catastrophe en novembre dernier pour pallier aux défections d’Hummels et Subotic. La Borussia va profiter de cette confiance retrouvée pour régaler ses 6’000 fans qui l’avaient accompagné dans le nord. Si Lukasz Piszczek ne trouve que la latte, il y aura deux nouveaux buts, un magnifique quatrième sur une talonnade délicieuse de Marco Reus et une conclusion en finesse d’Henrikh Mkhitaryan et un cinquième plus classique sur une rupture terminée avec sang-froid par Robert Lewandowski. Cela faisait depuis fin octobre et un match contre Stuttgart que notre équipe ne nous avait fait pas tellement plaisir, on a donc savouré ce magnifique après-midi de football.

Avec en prime un doublé pour Henrikh Mkhitaryan et Robert Lewandowski que l’on avait particulièrement critiqué ces derniers mois pour leur manque de réussite, d’adresse et de conviction dans le dernier geste : espérons que ce déplacement à Brême provoque un déclic. Pour Miki j’y crois, pour Lewa un peu moins, va savoir pourquoi… L’après-midi n’a toutefois pas été complètement faste, non pas tant à cause du but du l’honneur signé Levent Aycicek sur la fin mais en raison des blessures de Marco Reus et Sven Bender, qui contraindront le BVB à se présenter mardi en Coupe à Francfort contre l’Eintracht sans six titulaires. Embêtant, si l’on songe que cette DFB-Pokal représente la meilleure chance du Borussia de remporter un deuxième trophée cette saison après la Supercup et une finale à Berlin reste le truc le plus exaltant que peuvent rêver de vivre les fans d’ici au mois de mai.

Grandeur et décadence

Les supporters brêmois eux n’ont rien à attendre d’aussi palpitant cette saison. La pauvreté de la prestation des Werderaner samedi confirme qu’ils vont devoir lutter pour leur maintien. Au printemps 2009, le Nord de l’Allemagne se passionnait pour un quadruple duel entre Brême et Hambourg, en championnat pour une place en C1, en demi-finale de DFB-Pokal et en demi-finale de Coupe UEFA. Cinq ans plus tard, on pourrait bien retrouver les deux grands et vénérables rivaux hanséatiques à la lutte mais cette fois-ci pour éviter la chute en Zweite Liga. Grandeur et décadence mais c’est aussi cette hiérarchie mouvante qui fait le charme de la Bundesliga, même si l’on imagine que les supporters du Werder auraient préféré que ladite hiérarchie reste figée à leur époque de gloire, celle où leur club favori n’encaissait pas un 1-10 en deux matchs à domicile contre le Borussia Dortmund.

Werder Bremen – Borussia Dortmund 1-5 (0-2).

Weserstadion, 42’100 spectateurs (guichets fermés).

Arbitre: M. Perl.

Buts : 26e Lewandowski (0-1), 41e Mkhitaryan (0-2), 47e Friedrich (0-3), 62e Mkhitaryan (0-4), 85e Lewandowski (0-5), 89e Aycicek (1-5).

Brême: Wolf; Gebre Selassie, Prödl, Lukimya, Caldirola; Bargfrede, Junuzovic; Elia (55e Kobylanski), Hunt (79e Aycicek), Obraniak; Di Santo (55e Petersen). Entraîneur: Robin Dutt.

Dortmund: Weidenfeller ; Piszczek, M. Friedrich, Papastathopoulos, Schmelzer; Bender (65e Kehl), Sahin ; Aubameyang (77e Hofmann), Mkhitaryan, Reus (65e Grosskreutz); Lewandowski. Entraîneur: Jürgen Klopp.

Cartons jaunes: 13e Di Santo, 25e Friedrich, 69e Papastathopoulos, 70e Kobylanski.

Notes: Werder sans Garcia (suspendu), Fritz ni Ekici (blessés), Dortmund sans Subotic, Blaszczykowski, Hummels ni Gündogan (blessés).

Classement (20 matchs) : 1. Bayern 56 2. Leverkusen 43 3. BVB 39 4. Schalke 37 5. Mönchengladbach 33 6. Wolfsburg 33 7. Hertha 31 8. Augsburg 31 9. Mainz 30 10. Hanovre 24 11. Hoffenheim 22 12. Francfort 21 13. Brême 20 14. Stuttgart 19 15. Freiburg 18 16. Nürnberg 17 17. Hambourg 17 18. Braunschweig 12.

Catégories : Au StadeRetro

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