La dernière fois que nous avons joué le Derby en plein marché de Noël, c’était en novembre 2012. Et ça reste un très bon souvenir ! Une semaine après avoir battu le Bayern Munich, le Borussia Dortmund avait une nouvelle fois enchanté ses fans en remportant un Revierdery à sens unique contre le rival honni Schalke 04. Cerise sur le gâteau, ce succès permettait au BVB de reprendre sa place en tête du classement, alors qu’il comptait huit points de retard sur le leader deux mois auparavant. Oh, wie ist das schön…
On pensait avoir déjà tout vu et tout connu avec cette équipe du Borussia Dortmund mais les Jungs de Jürgen Klopp ont ajouté une nouvelle page à leur légende en s’offrant, en l’espace de huit jours, le scalp des deux grands rivaux Bayern Munich et, surtout, Schalke 04. Dans le genre semaine de rêve, difficile de faire mieux. Bien sûr, il y aura quelques esprits chagrins pour rappeler qu’entre les deux, il y a eu une défaite à Arsenal mais cette équipe du BVB est encore un peu tendre pour jouer des matchs de très haut niveau tous les trois jours. Et entre une victoire homérique à Munich et le Derby attendu par tout un peuple, il a été difficile de se mobiliser pour jouer une vague chance de qualification en Ligue des Champions contre Arsenal. Certains ont pu être choqués de voir l’entraîneur Klopp sortir son joyau Götze pour le ménager ou quitter l’Emirates le sourire aux lèvres malgré la défaite quasi éliminatoire des siens mais ici c’est Dortmund et ici un Revierderby ça compte beaucoup plus qu’un hypothétique huitième de finale de Ligue de Champions.
Jungs vs. Schüler
Il ne faudra pas attendre trop longtemps pour s’en rendre compte : portés par l’ambiance monstrueuse du Westfalenstadion, les Jungs du BVB ont d’emblée pris à la gorge une équipe de Schalke aux abois, comme dépassée par le cadre et l’atmosphère grandioses du temple jaune, y compris les superstars Raul et Huntelaar, invisibles durant tout le match. « On était comme des écoliers » admettra l’entraîneur königsblaue Huub Stevens, l’homme qui était réputé pour ne jamais perdre contre Dortmund. Condamnés à multiplier les fautes pour endiguer la déferlante jaune et noire, les Knappen vont rapidement être punis sur un coup franc lointain de Marcel Schmelzer repris victorieusement par la tête de Robert Lewandowski.
Pour l’occasion, le BVB arborait un maillot spécial Derby qui ne sera porté que pour ce match et il se trouve des pigeons pour l’acquérir. Et même des pigeons pour en acheter deux, en sachant pertinemment qu’ils ne les remettront jamais si le match tournait mal. Mais après un gros quart d’heure, mon maillot Derby floqué Lewandowski était déjà devenu collector… Après l’ouverture du score, Dortmund ne relâche pas la pression et Herne-West peut s’estimer tout heureux d’atteindre la pause avec un seul but de retard, grâce notamment à un sauvetage miraculeux de son jeune gardien Lars Unnerstall devant Mario Götze.
Felipe Santana, ce héros
En fait, le FC Gelsenkirchen ne fera illusion que dix minutes dans cette rencontre, les dix premières de la 2e mi-temps où il parviendra à faire quelques incursions dans le camp adverse et à se créer son unique occasion du match, un tir de Lewis Holtby dans le petit filet extérieur. Mais ce n’était qu’un feu de paille et le BVB a bien vite repris sa domination. Le 2-0 part d’un solo éblouissant de Mario Götze qui enrhume trois défenseurs bleu (mais pas royaux samedi), avant de se heurter à la bonne sortie de Lars Unnerstall. Sur le corner qui s’ensuit, le ballon revient sur Mats Hummels qui remise pour Lucas Barrios dont la reprise est sauvée par le portier Unnerstall. Mais Felipe Santana a bien suivi pour doubler la mise à bout portant : Felipe Santana, c’est le joker de luxe, l’éternel remplaçant, le mec qui fait sans doute partie des cinq meilleurs défenseurs centraux de Bundesliga mais pas de bol, les deux autres défenseurs axiaux du BVB, Hummels, et Subotic, aussi. Peut-être que son match énorme à Munich et son but dans die Mutter aller Derby lui permettront de changer de statut et d’avoir droit à une vraie concurrence pour une place de titulaire dans l’axe dortmundois.
Oh, wie ist das schön…
Avec un peu plus de réussite et sans deux nouveaux miracles d’Unnerstall, de très loin le meilleur joueur de Schalke samedi, devant Lewandowski et Barrios, le score aurait pu prendre des proportions beaucoup plus importantes. Mais l’essentiel était ailleurs : dans la dernière demi-heure, le spectacle était surtout dans les tribunes avec l’un de ces délires collectifs qui ont forgé la légende du Westfalenstadion et qui font du Revierderby sans doute le must absolu du foot européen rayon ambiance. Bref, on savoure ces moments magiques, les « Derbysieger hey hey » succèdent aux « Spitzenreiter hey hey », les « Deutscher Meister ist nur der BVB » alternent avec les « ihr seid nie Deutscher Meister » et les « ein Leben lang keine Schal in der Hand» et ça se finit par le bon vieux « Oh, wie ist das schön ». Voilà, c’était le cours accéléré du vocabulaire de survie pour un Revierderby à proximité de la Südtribüne, tu es blindé pour venir la saison prochaine.
Geil ! Geil ! Geil !
A la fin du match, les joueurs dortmundois finiront accrochés au grillage du mur jaune pour vingt bonnes minutes de rappel et de communion totale avec leurs fans. « Geil ! Geil ! Geil ! », comme a titré le Bild, et pour une fois ce n’était pas en rapport avec une pin-up légèrement vêtue. On poursuit la leçon d’allemand avec une autre devise du Revierderby « Derbysieg ist wie die Meisterschaft » et ce n’est pas une parole en l’air : la saison du BVB est réussie depuis samedi, tout ce qui viendra ensuite ne sera que du bonus. Pour se rendre compte à quel point une victoire contre l’ennemi juré venu de Gelsenkirchen représente bien davantage qu’une péripétie de football, il suffit de voir à quel point tous les visages irradient de bonheur en sortant du stade et, plus tard, au Marché de Noël. Enfin, presque tous les visages, ceux de mes camarades de route du week-end virent plutôt à la grimace lorsque je leur amène la tournée de Glühwein mit Schuss. Les ignares, ils ne savent pas ce qui est bon.
Ce qui est à coup sûr très bon, c’est que, cerise sur le gâteau, le BVB a en plus repris la tête du classement. Bayern Munich c’est fait, Schalke 04 c’est fait et même très bien fait mais le parcours du combattant n’est pas terminé pour le Borussia Dortmund, puisque son prochain match aura lieu à l’extérieur contre le Borussia, la faux, celui de Mönchengladbach. Et vu la forme étincelante des Fohlen en ce moment, des trois adversaires de cette trilogie infernale, c’est celui que je redoute le plus. En tous les cas, le déplacement du Borussia-Park samedi prochain ne manquera pas de piquant, je te raconterai.
Borussia Dortmund – Schalke 04 2-0 (1-0).
Signal Iduna Park, 80’720 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Meyer.
Buts : 16e Lewandowski (1-0), 61e Santana (2-0).
Dortmund: Weidenfeller; Piszczek, Santana, Hummels, Schmelzer; Leitner, Kehl; Blaszczykowski (89e Grosskreutz), Lewandowski, Götze (89e Owomoyela); Barrios (78e Kagawa). Entraîneur: Jürgen Klopp
Schalke : Unnerstall ; Uchida, Papadopoulos, Matip, Fuchs ; Jones, Holtby (82e Jurado); Baumjohann (79e Marica), Raul, Draxler (54e Pukki); Huntelaar. Entraîneur: Huub Stevens.
Cartons jaunes: 35e Jones, 43e Papadopoulos, 58e Matip, 64e Uchida, 79e Kehl.
Notes: Dortmund sans Subotic, Bender ni Koch (blessés), Schalke privé de Hoogland, Höwedes, Farfan, Kluge, Fährmann et Kenia (blessés).
Classement (14 matchs) : 1. BVB 29 2. Mönchengladbach 29 3. Bayern 28 4. Werder 26 5. Schalke 25 6. Leverkusen 22 7. Stuttgart 21 8. Hanovre 20 9. Hoffenheim 18 10. Hertha 18 11. Köln 16 12. Wolfsburg 16 13. Mainz 15 14. Nürnberg 15 15. Hambourg 14 16. Kaiserslautern 13 17. Freiburg 12 18. Augsburg 11.
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