En quinze jours et quinze buts en trois matchs, le Borussia Dortmund a ramené de sept à trois longueurs son retard sur la tête du classement. De quoi nourrir les rêves les plus fous… Mais si notre équipe peut nous ravir par la qualité du jeu qu’elle produit, elle est aussi capable de nous désespérer par la nonchalance et la facilité dans laquelle elle peut trop facilement tomber.

Dans les discours d’avant Rückrunde, dirigeants, joueurs et entraîneur étaient unanimes : si le BVB voulait rêver de titre ce printemps, il serait impératif de commencer par trois matchs et neuf points contre des adversaires de deuxième partie de classement. C’est désormais chose faite, difficilement à Augsburg, beaucoup plus aisément contre Köln et Union Berlin mais la mission est accomplie. Avec en prime quinze buts en trois matchs. Il y a de nouveau de la place pour des rêves de Meisterschale à Dortmund. Mais le tableau n’est peut-être pas si idyllique qu’il n’y paraît car notre équipe est toujours aussi schizophrène, capable d’aligner le pire et le meilleur.

Traumstart

Il faisait un sale temps en ce samedi sur le Ruhrpott, rien à voir avec la canicule du match aller à Köpenick. Néanmoins, le déluge annoncé n’a pas eu lieu, nous avons pu effectuer la tournée des Biergarten au sec, donner en vitesse une interview pour une chaîne française déjà toute émoustillée par un lointain match de Coupe d’Europe et arriver au stade sous un coin de ciel bleu.

Heureusement, le scénario du match aussi fut très différent de l’aller… Après ses entrées en jeu tonitruantes à Augsburg et contre Köln, le peuple jaune et noir attendait avec impatience la première titularisation d’Erling Haaland. Lucien Favre a exaucé ses vœux en introduisant le colosse norvégien en lieu et place de Thorgan Hazard. Mais c’est un autre Jungs, désormais presque ringardisé au statut d’ancien, Jadon Sancho, qui s’est mis le premier en évidence : le prodige anglais profite d’une récupération habile de Raphaël Guerreiro pour perforer la défense renforcée d’Eisern Union et ouvrir le score d’un tir dévié. Le BVB ne relâche pas la pression et, après un coup franc de Guerreiro détourné par le gardien Gikiewickz, Erling Haaland fête cette première titularisation en jaune et noir par un but en reprenant un centre au cordeau de Julian Brandt. 2-0 après moins de vingt minutes face à des Köpenicker complètement dépassés, on paraissait partis pour vivre un score fleuve. Et puis…

La sieste du samedi

Et puis plus rien ou presque pendant cinquante minutes. Bien sûr, notre équipe a un calendrier chargé dans les semaines à venir, elle doit aussi penser à s’économiser mais elle nous exaspère un peu avec cette propension à tomber dans la facilité et la suffisance. Et mine de rien, à force de jouer à la baballe et de ronronner, on se met en danger. Contre Eisern Union, nous n’avons pas été vraiment en difficulté mais ça aurait pu être le cas : Schlotterbeck s’est retrouvé bien seul après un coup franc mais n’a pas cadré alors que notre bourreau du match aller, Bülter, a frappé juste à côté. Le risque était là, un but berlinois aurait fait changer l’espoir de camp et la nervosité serait passé de notre côté. Et on a que trop souvent expérimenté la difficulté qu’à notre équipe à gérer une fin de match tendue dans une rencontre qu’elle aurait dû plier bien avant. On n’a pas une sécurité défensive qui nous permette de gérer tranquillement un match : dès qu’on enlève le rythme et l’intensité, notre équipe devient très quelconque et vulnérable.

Tu vas me dire que c’est plus royaliste que le roi de critiquer après une victoire 5-0 mais, en déjouant comme cela durant 50 minutes, on prend de très mauvaises habitude. Et, comme par hasard, trois jours plus tard, on débarque à Brême en touristes, pensant que tout allait être facile après les quinze buts marqués en trois matchs et que  les goals allaient tomber tout seul. Résultat : une mi-temps sans intensité ni aucun duel gagné et au final une grosse désillusion dans une compétition qu’on avait vraiment envie de gagner cette saison. Je n’étais pas à Brême, je ne vais donc pas en rajouter mais nos Jungs manquent de professionnalisme et de rigueur : on n’est pas obligés de jouer tous les matchs à 120%, on peut souffler quelque fois mais, si l’on veut arriver à quelque chose, on n’a vraiment plus le droit de pareillement sortir d’un match ou entrer avec quarante-cinq minutes de retard parce qu’on se croit arrivés après l’une ou l’autre performance brillante. C’est là que l’on regrette l’absence d’un ou deux vieux grognards qui soient capable de rameuter et de sonner le réveil des troupes en poussant une gueulée sur le terrain ou en plaçant un tacle bien appuyé. Nos Jungs n’aiment pas qu’on les interroge sur la mentalité (ou plutôt sur le manque de…) de l’équipe mais force est de constater que ce BVB 2019-2020 n’a pas vraiment (encore ?) un mental de champion.

Le réveil

Heureusement, après cinquante minutes aussi creuse (ou presque) qu’un discours de Greta Thunberg, nos Jungs ont eu la bonne idée de se réveiller pour embraser un Westfalenstadion qui avait lui aussi tendance à s’assoupir. C’est tout d’abord Erling Haaland qui se fait accrocher par Gikiewick, Marco Reus transforme le pénalty pour dissiper toutes nos craintes et nous offrir une fin de match festive et bruyante. Moins de deux minutes plus tard, Axel Witsel reprend un centre de Jadon Sancho pour inscrire le numéro quatre en force sous la barre. Enfin, il est revenu à Erling Haaland de clore la fête de tir à quinze minutes du terme après un débordement de Raphaël Guerreiro et une talonnade raffinée de Julian Brandt, qui me plaît de plus en plus. Et deux buts de plus pour notre nouveau Torjäger scandinave, portant son total à sept en trois matchs, même pas disputés dans leur intégralité. C’était l’occasion pour Nobby Dickel d’entraîner son très chantant « Erling » : après s’être contenté d’un sobre « Erling » sur le 2-0, il nous gratifie d’un triple « Erling » à toutes les sauces sur le 5-0. Bref, le Westfalenstadion peut rugir de bonheur, quinze buts en trois matchs, tout n’a pas été parfait mais le BVB a rempli la mission qu’il s’était assignée : remporter ses trois premiers matchs du deuxième tour.

Neven, le retour

Chaque match a sa propre histoire mais, quand on voit la facilité avec laquelle le Borussia a démonté Union Berlin, tout en ayant somnolé plus d’une mi-temps, cela rend d’autant plus impardonnable la défaite du match aller et notamment la manière dont nous avions joué en deuxième mi-temps. Puisque nous sommes dans les points négatifs, nous n’avons guère apprécié les gestes d’humeur d’Achraf Hakimi et Marco Reus à leur sortie du terrain ; il n’y a pas de quoi non plus en faire toute une histoire mais ça dégage quand même impression un peu enfants gâtés qui ne nous plaît que moyennement. Mais cela n’a pas empêché le Westfalenstadion de célébrer son équipe.

Avant le moment que nous attendions tous : le rappel de Neven Subotic devant la Südtribüne. Notre ancien numéro quatre a eu droit à une ovation encore plus grandiose que lorsqu’il était revenu sous le maillot du 1. FC Köln. J’ai toujours eu une vision un peu romantique du football qui cadre de moins en moins avec le football moderne mais je m’autorise quelques instants à rêver que quelques-uns de nos Jungs actuels puissent s’inspirer de l’exemple de Neven et aient envie de développer le même amour et respect pour le maillot afin qu’un jour ils aient eux aussi droit à un tel accueil, même quelques saisons après avoir quitté le club. Mais là je rêve sans doute un peu…

Lütge Eck

Après avoir célébrer un ancien héros, on va rendre un hommage à notre nouveau buteur Haaland, né à Leeds, à l’époque où son père y jouait. Cela tombe bien : Dortmund est jumelée avec Leeds et mon bar préféré est situé à proximité de la Platz von Leeds.

Après cette escapade culturelle, nous allons assister aux dernières minutes de Leipzig – Mönchengladbach sur l’écran du Lütge Eck. Tout le monde rouspète quand les Bullen égalisent à 2-2 sur la fin, c’est la tradition : un but du RB est forcément une mauvaise nouvelle pour le football mais on ne peut s’empêcher de penser que voir deux de nos adversaires directs se neutraliser ne constitue pas une mauvaise affaire pour nous. Après la défaite d’Hoffenheim, nous étions relégués à sept points du leader ; en seulement trois matchs et quinze buts marqués, nous avons repris cinq points à Leipzig et refait plus de la moitié de notre retard sur la tête du classement, en l’occurrence le nouveau leader le Bayern Munich. Le BVB peut à nouveau rêver de Meisterschale et cela a suffi  à mettre le Lütge Eck sens dessus-dessous une partie de la nuit.

Tout semblait concourir pour enclencher une dynamique positive mais le couac de Brême est venu tout remettre en question. Maintenant, il faut faire abstraction de la Pokal et repartir du bon pied lors du déplacement à Leverkusen. Un tout autre calibre que tous les adversaires affrontés depuis la reprise, un adversaire direct pour les places en Ligue des Champions, une grosse force de frappe offensive, bref un match qu’il s’agira de jouer à fond pendant 90 minutes. Pour faire vivre l’espoir d’une fin de saison grandiose et ne pas revivre le désespoir d’une équipe incapable de confirmer son immense potentiel.

Catégories : Au Stade

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