C’était le 3 octobre 2010, un jour charnière dans l’Histoire de notre club, l’amorce du retour vers les sommets. Après une longue traversée du désert, le Borussia Dortmund était de retour aux affaires. En atomisant le Bayern Munich dans un Westfalenstadion en transe, le BVB confirmait son début de saison éblouissant et s’octroyait déjà dix points d’avance sur le Rekordmeister.
Borussia Dortmund – Bayern Munich, c’était le grand choc du football allemand dans les années 1990. Depuis, le BVB a connu une grave crise financière, a failli disparaître et a dû revoir ses ambitions à la baisse. Du coup, Dortmund – Bayern, ça restait un duel de prestige mais les deux clubs ne militaient plus vraiment dans la même catégorie, tant financièrement que sportivement. Aujourd’hui, il y a toujours un gouffre entre les deux sur le plan financier, les seuls transferts de Tymoschchuk et Gomez, habituellement remplaçants au Bayern, ont coûté plus chers que les salaires annuels de tout l’effectif du BVB. En revanche, sur le plan sportif, la politique de reconstruction du Borussia en misant sur les jeunes commence à porter ses fruits et, au coup d’envoi, c’est bien Dortmund qui possède la meilleure attaque et la meilleure défense de la ligue, avec sept points d’avance sur le Bayern, plus mauvaise attaque du championnat ! Et cette euphorie dortumundoise n’a même pas été ébréchée par le vilain arbitre anglais qui avait floué le BVB trois jours auparavant en Europa League contre des Sévillans recroquevillés en défense et incapables de se créer des occasions de but. Comme quoi, l’histoire est un éternel recommencement… Mais laissons nos amis d’outre-Pyrénées à leurs magouilles, contrôles positifs et autres spécialités locales et revenons au vrai sport.
Dortmund ist zu nervös
Au Bayern, on ne fait rien comme ailleurs et, alors que le club réalise son plus mauvais début de saison depuis des lustres, les dirigeants ont décidé de … prolonger le contrat de leur entraîneur Louis van Gaal. Une sorte de choc psychologique à l’envers. L’entraîneur batave a tenté de relancer son équipe en titularisant Braafheid et Gomez, très peu utilisés jusque-là, et en repositionnant Schweinsteiger en numéro 10. Cela ne fonctionne pas trop mal en première mi-temps : sans être transcendants, les Bavarois paraissent beaucoup plus solides et compacts qu’une semaine auparavant contre Mainz. « Dortmund ist zu nervös », assènent, avec leur arrogance caractéristique, les supporters du Bayern assis juste derrière nous, après avoir machiavéliquement dissimulé leurs attaches partisanes pour pénétrer dans un bloc normalement réservé aux supporters du BVB. Nous sommes bien entendu restés polis et courtois mais gageons que, la prochaine fois, ils ne viendront pas s’asseoir là : la deuxième mi-temps a dû être très, très, très longue pour eux.
Mario Gomez est magique
Ceci dit, nos nouveaux amis bavarois n’avaient pas complétement tort : on sent une jeune équipe dortmundoise un peu sur la retenue, ce n’est pas le même jeu flamboyant que lors des dernières sorties. Même en difficulté le Bayern fait toujours peur, il y avait tout de même neuf demi-finalistes de la Coupe de Monde dans les rangs munichois au coup d’envoi. La 1ère mi-temps est plutôt à l’avantage des visiteurs mais fort heureusement leurs quatre occasions de but sont toutes échues à Mario Gomez, qui a mis un zèle tout particulier à les galvauder, avec deux essais à côté et deux sauvetages miraculeux de Subotic et Weidenfeller.
La Südtribüne a encore frappé
Pour le Bayern, le plus dur restait toutefois à faire, défendre en 2e mi-temps dos au mur jaune, une configuration dans laquelle nombre d’équipe se sont déjà effondrées. Tu vas me dire, les stars bavaroises en ont vu d’autres, une équipe qui se qualifie après avoir été menée 3-0 à Old Trafford est blindée contre ce genre de pression. Eh bien non, la magie de la Südtribüne a une nouvelle fois fonctionné et la physionomie du match a complètement changé dès lors que le Borussia a attaqué face à ses supporters. Comme souvent, le détonateur s’est appelé Lucas Barrios, éblouissant depuis le début de la saison et impliqué dans la majorité des nombreux buts inscrits ces dernières semaines par le BVB. L’Argentino-Paraguayen a profité d’un mauvais renvoi de Demichelis (auteur d’une entrée en jeu catastrophique en lieu et place de van Buyten, blessé) pour armer une frappe déviée par Badstuber hors de portée de son gardien Butt. La tâche du Bayern venait de singulièrement se compliquer car lorsque ses joueurs, galvanisés par les chœurs, gagnent tous les duels, Dortmund est quasiment injouable.
A sens unique
L’ambiance était indescriptible alors je ne vais pas essayer de te la décrire, avec ces dizaines de milliers de fans restés fidèles malgré les années de vaches maigres et qui sont aujourd’hui récompensés de leur patience. Le Bayern n’y est plus du tout, les joueurs paraissent perdus sur un terrain trop grand pour eux et juste capables de commettre quelques fautes de pure frustration. Largement en tête dans la statistique des tirs au but avant la pause, les Rekordmeister encaissent un sec 7 tirs à 0 entre la 46e et la 70e ! L’estocade viendra d’un Nuri Sahin une nouvelle fois exceptionnel et qui, en compagnie de Sven Bender, a complétement éclipsé le trio van Bommel-Pranjic-Schweinsteiger. Le natif de Lüdenscheid a définitivement assommé le Bayern avec une merveille de coup franc en pleine lucarne, le gardien Butt n’a même pas bougé. Le score aurait pu être plus sévère, avec notamment un tir de Barrios sur le poteau (70e). Et même Roman Weidenfeller s’est montré impérial sur les sorties aériennes, c’est dire si tout rigole au BVB en ce moment ; le gardien dortmundois écœurera définitivement la plus mauvaise attaque de Bundesliga (je ne m’en lasserai jamais…) avec un arrêt réflexe salvateur devant Olic à la 89e.
Privés d’Oktoberfest
Cette défaite relègue le Bayern à treize points du leader Mainz et dix du Borussia Dortmund. Jusque-là, le discours officiel côté bavarois c’était du genre « Pas de panique, on a déjà redressé des situations plus compromises que cela et pas plus tard que l’an dernier ; dès que Robben sera revenu et qu’on sera mieux physiquement, on défoncera tout le monde. » La donne a un peu changé avec ce nouveau revers et l’inquiétude commence à poindre dans les théories des dirigeants, à tel point que la traditionnelle et immuable visite des joueurs à l’Oktoberfest a été annulée. J’espère que cette sanction ne donnera pas de mauvaises idées à mon entraîneur… En tous les cas, la crise n’est pas loin au FC Hollywood.
Qui arrêtera le BVB ?
A Dortmund en revanche, c’est l’euphorie après cette sixième victoire consécutive en championnat qui permet au club de prendre une avance conséquente sur les principaux favoris de cette Bundesliga 2010-2011. Une certaine presse, qui ne plaçait même pas le BVB dans les cinq premiers des pronostics d’avant-saison, évoque aujourd’hui ouvertement le titre. Même si la septième victoire consécutives du FSV Mainz est de bonne augure puisque les deux seules fois dans l’histoire de la Bundesliga où une équipe avait démarré la saison par sept succès (Kaiserslautern en 1995-1996 et Bayern en 2001-2002), Dortmund avait été sacré en fin de championnat, cela paraît prématuré. L’équipe est très jeune et le contingent un peu court pour jouer la gagne sur tous les tableaux. Le championnat est encore long, il sera toujours temps de faire les comptes en fin de saison, pour l’instant il vaut mieux profiter de cette subite embellie. Dimanche, trente minutes après le coup de sifflet final, les chants s’élevaient encore dans le Westfalenstadion, alors que, avec le retour inopiné de l’été, la fête démarrait dans les Biergarten avoisinants. On avait eu la bonne idée de prendre congé lundi, par contre on en connaît d’autres qui n’ont pas dû être très productifs au travail. Mais bon, cette victoire historique en forme de renaissance valait bien un début de semaine un peu difficile.
Borussia Dortmund – Bayern Munich 2-0 (0-0).
Signal Iduna Park, 80’720 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Meyer.
Buts : 51e Barrios (1-0), 60e Sahin (2-0).
Dortmund: Weidenfeller; Piszczek, Subotic, Hummels, Schmelzer; Bender, Sahin (87e da Silva); Blaszczykowski, Kagawa (75e Lewandowski), Grosskreutz; Barrios (86e Feulner).Entraîneur: Jürgen Klopp.
Bayern: Butt; Lahm, van Buyten (46e Demichelis), Badstuber, Braafheid (61e Olic); van Bommel, Pranjic; Müller, Schweinsteiger, Kroos; Gomez. Entraîneur: Louis van Gaal.
Cartons jaunes: 67e Demichelis, 80e Olic, 83e Schweinsteiger.
Notes: Dortmund sans Kehl, Hajnal, Dede, Kringe, Owomoyela, Zidan (blessés) ni Götze (malade), le Bayern privé de Ribéry, Robben, Alaba, Contento et Altintop (blessés).
Classement (10 matchs) : 1. Mainz 21 2. Dortmund 18 3. Hanovre 13 4. Leverkusen 12 5. Freiburg 12 6. Hoffenheim 11 7. Hamburg 11 8. Wolfsburg 10 9. St. Pauli 10 10. Frankfurt 9 11. Nürnberg 9 12. Bayern 8 13. Brême 8 14. Kaiserslautern 7 15. Mönchengladbach 6 16. Köln 5 17. Schalke 4 18. Stuttgart 3.
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