Nous t’avons récemment proposé un article qui expliquait pourquoi les fans du BVB n’appréciaient guère la formule actuelle de la Ligue des Champions et je souscris complètement à ce qui y était dit. Pour moi, la Königsklasse est au football ce qu’un gros blockbuster américain est au cinéma : dialogues médiocres, scénario insipide et prévisible, gags éculés, le genre de truc qui ne vaut que par un marketing agressif et un casting prestigieux et dont le seul but est d’avachir un maximum de consommateurs devant leur écran pour gagner le maximum de fric. Dès lors, nous autres pauvres supporters amateurs de passion, d’émotions et d’authenticité sommes contraints de profiter des quelques rares occasions de vibrer dans cette sinistre mascarade commerciale. Lors du dernier tirage au sort, c’était la consternation en découvrant un énième duel rébarbatif avec le Real, mitigé avec un deuxième déplacement au Portugal cette année face au Sporting et l’exultation lorsque la boule de Legia Varsovie est sortie dans notre groupe. Après 20 ans d’absence, la Pologne, ses ambiances de feu et ses supporters déjantés, retrouve la Ligue des Champions et notre BVB sera de la fête. Jaaaaawohl !!! C’était donc LE déplacement à ne pas rater dans cette campagne européenne et il a parfaitement répondu à nos espérances.
Biergarten
Comme on le répète, un match du Borussia, cela se mérite, en l’occurrence par un réveil à 3h du matin afin de traverser toute la Suisse en vue d’attraper mon vol pour Varsovie. En arrivant dans la capitale polonaise, l’ambiance n’est pas encore au foot car le peuple jaune et noir a respecté les consignes de ne pas afficher ses couleurs en ville par crainte d’une scène hooligans locale réputée turbulente. Cela ne nous empêche pas de vivre une magnifique journée sous un soleil radieux dans les rues et bars de cette magnifique ville. Il faut attendre d’arriver au stade pour enfin apercevoir nos premiers maillots schwarzgelben dans le gigantesque Biergarten ultra-sécurisé aménagé à notre attention dans un parc voisin de l’antre du Legia, préféré au stade national, pourtant beaucoup plus grand, afin de garantir une ambiance maximale. Une excellente initiative car ce stade du Maréchal Józef Piłsudski (Wojska Polskiego) se révélera être un véritable chaudron rempli par 30’000 fans survoltés. L’entrée a été un peu chaotique mais, après 45 minutes de lutte, nous parvenons enfin à pénétrer en bloc visiteurs.
Quelle ambiance !
J’attendais avec impatience de découvrir l’ambiance de Varsovie, je n’ai pas été déçu. Après quelques chants qui claquent vraiment fort, les fans du Legia nous offrent un somptueux Choreo, ça brûle de partout et, au-delà de l’esthétique, on apprécie le message moqueur envers l’UEFA qui, il y a deux saisons, avait privé le Legia de Ligue des Champions pour une sombre histoire de joueur non qualifié alors que les Polonais avaient très largement dominé le Celtic Glasgow à la régulière en éliminatoire. Cette fois-ci, l’UEFA n’a pas trouvé de combines pour les exclure et elle doit donc se résoudre à accueillir le Legia dans sa compétition phare. Forcément, après vingt ans d’absence dans la compétition, il règne un enthousiasme et une ferveur que l’on ne retrouve plus dans les clubs blasés aux stades remplis de touristes qui la disputent chaque année. Nous avons donc eu droit à nonante minutes de chants ininterrompus, même l’évolution du score n’a pas calmé l’ardeur des clameurs polonaises, même à 0-6 tout le stade était encore à sautiller et à agiter des écharpes. Respect, j’adore ces ambiances où tu sens vibrer les gradins sous tes pieds, c’est pour vivre de telles soirées que nous sillonnons l’Allemagne et l’Europe tout au long de la saison. On regrettera juste l’assaut donné contre les grillages de notre Block par quelques hooligans cagoulés juste avant la mi-temps, rien de bien méchant mais c’est toujours un peu triste d’en arriver là à coup de sprays au poivre contre les agents de sécurité. Peut-être que c’était pour poivrer un peu nos fades zapienkenka servies en Gästeblock, sorte de baguettes de pizzas joyeusement recouvertes de ketchup, une horreur. Une saison Unterwegs, c’est aussi l’occasion de quelques redoutables expériences gastronomiques.
Vite fait, bien fait
Dans une ambiance aussi survoltée, notre équipe aurait forcément été en danger en abordant le match avec le même dilettantisme qu’à Leipzig. Heureusement, on a retrouvé le vrai BVB, non pas une équipe qui se contente de faire tourner mollement le ballon et d’aligner les passes alibi, mais une équipe qui va de l’avant et est animée par l’envie d’aller faire mal à l’adversaire avec toute la rage et la détermination requises devant le but. Et cela va rapidement porter ses fruits sur un centre d’Ousmane Demebelé pour Mario Götze qui fête son premier but depuis son retour au meilleur moment, juste avant des retrouvailles attendues avec le Westfalenstadion en Bundesliga contre Darmstadt qui pourraient finalement être moins compliquées que prévu compte tenu de l’attitude plutôt conciliante des ultras à son égard mercredi. C’était au tour du Gästeblock de prendre feu. Nous aurons parfaitement su répondre au défi lancé par les fans du Legia en tribune avec une très grosse ambiance dans le virage jaune et noir. La performance de nos Jungs y aura aussi contribué puisque Sokratis sur centre de Guerreiro et Bartra après un cafouillage nous permettent d’inscrire le 0-3 le plus rapide de l’histoire de la Königsklasse.
A sens unique
Le match était plié mais nos Jungs se sont fait plaisir en soignant la différence de but. Et ce match aura permis à des joueurs pas trop utilisés ou guère en réussite jusque-là de s’illustrer : Götze donc, notre charnière centrale, avec un but chacun pour Sokratis et Bartra, Dembelé enfin impliqué sur deux buts dortmundois, Guerreiro qui couronne avec un but une performance magnifique à un poste inhabituel pour lui, Pulisic, passeur sur le 0-5 de Castro… Et c’est finalement Aubameyang qui scellera le score à 0-6. On ne parlera pas de match de référence car nous avons quelques doutes sur la qualité d’un Legia qui a paru bien faible. Ce groupe pourrait bien ressembler à celui de 2013-2014, avec Arsenal, Naples et Marseille, avec un adversaire complètement largué et trois équipes qui se déchirent pour deux places. Dans ce contexte, il sera essentiel de ne pas égarer de points contre le maillon faible Legia et notre équipe a parfaitement su faire le job. Ce n’était pas toujours brillantissime mais solide et efficace, Varsovie n’a pas eu l’ombre d’une chance.
La totale !
Ce déplacement en Pologne occupera donc une place de choix dans le hit-parade de nos meilleurs déplacements européens avec le BVB. Jusque-là, nos escapades les plus réussies en terme d’ambiance, de fête ou d’aventure, Donetsk, Malaga, Salonique, Liverpool ou Krasnodar ne s’étaient jamais conclues par une victoire de nos Jungs, là nous avons la totale : la fête, l’ambiance, une vie nocturne trépidante et une victoire fleuve. Bref, Varsovie a tenu toutes ses promesses et cette épopée européenne ne pouvait mieux débuter ! La suite s’annonce peut-être moins trépidante avec des adversaires beaucoup plus rompus aux joutes européennes, on aura donc pleinement profité de cette escapade hors des sentiers battus.
Julien Mouquin
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