Il y a sept ans, le 6 avril 2013, malgré sa victoire contre Augsburg, le Borussia Dortmund perdait officiellement, au profit du Bayern Munich, le titre de champion d’Allemagne qu’il détenait depuis deux ans. C’est donc à un enterrement de première classe auquel on avait assisté au Westfalenstadion. Dans la joie et la bonne humeur !
En débarquant samedi au Westfalenstadion pour les nombreux apéros d’avant-match dans les divers Biergarten, on se doutait bien que l’on était là pour un enterrement. Celui du Borussia Dortmund champion d’Allemagne. Car, quel que soit le résultat de Dortmund – Augsburg, il suffisait d’une victoire (prévisible) du Bayern Munich à Francfort pour que le Rekordmeister soit mathématiquement sacré champion d’Allemagne. Cela n’empêche pas le stade d’afficher complet, le public du Borussia Dortmund est sans doute le moins événementiel de la planète : on était 80’000 il y a six ans lorsque le club luttait contre la relégation en produisant un jeu misérable, il faudra bien davantage qu’une deuxième place et un titre perdu pour avoir raison de la passion et de la fidélité du meilleur public du monde™. On a même été envahis par une bouffée de nostalgie en repensant aux années de galère, il y a avait moins de Modefans à l’époque, plus d’authenticité et c’était un peu plus facile de trouver des billets côté sud quand on voulait faire découvrir la magie du mur jaune à des amis. Le succès, ça n’a pas que des avantages, on ne voudrait surtout pas que notre club favori devienne une marque planétaire style Barcelone ou Manchester United avec des gamins du monde entier qui se découvrent soudainement « fan depuis toujours du BVB » alors qu’ils n’ont jamais mis les pieds dans la Ruhr et des prix qui explosent jusqu’à devenir inaccessibles pour les fans historiques.
L’énigmatique Augsburg
L’adversaire du jour s’appelle Augsburg, un club assez étrange. Après avoir longtemps vivoté entre quatrième et deuxième division, le club bavarois s’est découvert des ambitions il y a cinq ans grâce aux largesses d’un sponsor. Un nouveau stade a été construit, un recrutement de qualité a été effectué et, après un premier échec en barrages en 2010 contre Nürnberg, la première promotion en Bundesliga de l’histoire du club a été fêtée en 2011. Mais s’il faisait partie des cadors en Zweite Liga, Augsburg s’est retrouvé parmi les petits poucets de la Buli. Du coup, le maintien passe par le système D, c’est-à-dire un recrutement avisé dans les séries inférieures, la capacité de relancer des joueurs en disgrâce ailleurs, de la stabilité et surtout beaucoup de travail et de combativité. Cela a fonctionné la saison passée ; malgré une entame de championnat calamiteuse, le FCA n’a pas paniqué, a laissé bosser son entraîneur et faire progresser le groupe pour aller chercher un maintien mérité et finalement assez aisé grâce à un superbe deuxième tour. L’histoire pourrait se répéter : avec un changement d’entraîneur et de manager plus un recrutement estival raté, avec notamment les flops Sio et Bancé, Augsburg a longtemps fait figure de relégué en puissance. Mais, malgré son inexpérience, le jeune entraîneur Markus Weinzierl a toujours conservé la confiance des dirigeants, c’est au contraire le manager qui a foiré le recrutement qui a sauté et désormais le FCA va mieux. Certes, le chemin qui conduit au maintien est encore long mais, dans la lutte pour éviter l’avant-dernière place synonyme de relégation directe, les Bavarois me paraissent partir avec une longueur d’avance sur Hoffenheim qui en est déjà à son quatrième entraîneur de la saison. Et ils peuvent même rêver d’un maintien direct sans passer par la case barrage en dépassant un Düsseldorf qui n’avance plus trop en ce moment.
Turn-over
L’après-midi débute d’une manière un peu surréaliste et pas seulement en raison du contrecoup d’une nuit dans le car à déguster (enfin, façon de parler) des bières locales suisse-allemandes. Et dire que j’avais prévu de faire un trajet tranquille pour réparer des fatigues de Malaga, ce n’est pas toujours facile la vie de supporter. On est d’autant plus déstabilisé que le BVB commence par attaquer face à la Südtribüne, ce qui est très inhabituel et déplaît souverainement au peuple jaune, et que l’équipe alignée est assez inédite. On se doutait que, trois jours avant un match décisif en Ligue des Champions contre Malaga, Jürgen Klopp allait faire tourner son effectif mais pas à ce point. Le secteur offensif est en particulier complètement nouveau, avec les débuts (réussis) du prometteur Jonas Hofmann en Buli. Là, j’ai quand même un peu l’impression que Kloppo est allé un peu loin et n’a pas montré un respect fou pour l’adversaire.
Inquiétant
Néanmoins, cette classe biberon du BVB va dominer son sujet pendant quarante minutes et logiquement ouvrir le score sur une mine à bout portant de Julian Schieber bien décalé par Leonardo Bittencourt. Augsburg paraissait complètement inoffensif, même contre ce Dortmund B. Et pourtant, les Bavarois vont arriver en avance à la mi-temps avec deux buts en moins de deux minutes, d’abord sur un mauvais renvoi de la défense pour une volée de Daniel Baier qui surprend le gardien Mitch Langerak puis sur un renvoi hasardeux du portier australien qui permet à Kevin Vogt de marquer dans le goal vide. Ce qui est relativement inquiétant, c’est que la défense était le secteur le moins remanié de BVB et que trois des cinq éléments défensifs alignés samedi devraient aussi être titulaires contre Malaga contre lequel un tel moment d’égarement serait rédhibitoire. La Brinkhoff’s de la mi-temps avait donc un goût amer, surtout qu’on en avait en quantités, les tournées pleuvaient un peu de partout : quitte à perdre le titre, autant le faire avec honneur. Et puis, je suis le premier à souhaiter une chute d’Hoffenheim mais ça m’aurait gêné que mon club favori fausse la lutte contre la relégation pour avoir bradé ce match contre Augsburg.
Toujours plus beau quand c’est inutile
Jürgen Klopp a dû être du même avis car il fait rapidement entrer Götze et Lewandowski et c’est tout de suite autre chose. Le BVB égalise au terme d’une triangulation entre Robert Lewandowski, Jonas Hofmann et Julian Schieber comme à la parade, avant de prendre l’avantage sur un corner de Mario Götze repris par Neven Subotic. Le tournant du match est intervenu entre ces deux buts lorsque le Bavarois Moravek est parti seul au but mais n’a pu concrétiser. Götze sera tout aussi peu inspiré quelques minutes plus tard en ratant le goal vide, il faudra que quelqu’un pense à lui dire que ce n’est pas vraiment la période des vendanges mais plutôt de l’encavage et que mardi il serait plutôt bienvenu de mettre Malaga en bouteille. Finalement, ce match contre Augsburg, qui s’est avéré plus festif et animé que prévu, se conclura par un but de l’inévitable Robert Lewandowski après avoir fait du Vreni Schneider, soit du slalom et du tricot, dans la surface adverse, avec Mario Götze. Cette victoire n’a toutefois pas permis d’obtenir un nouveau sursis puisque le Bayern a assuré son Meisterschale en s’imposant à Francfort.
La résurrection ?
Selon la coutume, un enterrement se termine par une agape et un apéro : celui du BVB n’a pas dérogé à la tradition. Généralement, dans ce genre de circonstances, après un moment d’affliction et quelques verres, les larmes sèchent et on commence à s’échanger anecdotes graveleuses et plaisanteries douteuses sur le défunt. Disons que là, la période d’affliction a été moins longue que la verrée, cela fait pas mal de temps que l’on a fait le deuil de ce titre. Et il n’y a pas trop de regrets à avoir, le Bayern Munich était au-dessus, il n’y avait qu’à s’incliner et les féliciter pour leur saison stratosphérique. Le Rekordmeister a su tirer les leçons de son triple échec du printemps dernier pour se renforcer sur et hors du terrain afin de revenir plus fort que jamais, il n’y a rien d’infamant à laisser le titre à ce Bayern-là, même si l’on aurait bien sûr souhaité que le duel soit un peu plus accroché. Et puis, trois jours après le décès du Borussia Dortmund champion d’Allemagne, on a bon espoir de fêter la résurrection du Borussia Dortmund demi-finaliste de Ligue des Champion, même si j’ai un mauvais pressentiment pour ce match retour contre Malaga. En tous les cas, mardi 20h45, on sera un poil plus tendus qu’avant ce match de répétition bien gentil contre Augsburg.
Borussia Dortmund – FC Augsburg 1907 4-2 (1-2).
Signal Iduna Park, 80’400 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Schmidt.
Buts : 22e Schieber (1-0), 43e Baier (1-1), 45e Vogt (1-2), 52e Schieber (2-2), 64e Subotic (3-2), 92e Lewandowski (4-2).
Dortmund: Langerak; Grosskreutz, Subotic, Santana, Schmelzer; Bender, Sahin; Hofmann, Leitner (52e Götze), Bittencourt (52e Lewandowski); Schieber (83e Kehl). Entraîneur: Jürgen Klopp.
Augsburg: Manninger; Verhaeg, Callsen-Bracker, Klavan, Ostrzolek; Baier; Hahn, Vogt (68e Oehrl), Ji, Werner (80e Tchoyi); Mölders (46e Moravek). Entraîneur: Markus Weinzierl.
Cartons jaunes: 24e Hahn, 46e Schieber, 76e Klavan, 93e Baier,
Notes: Dortmund sans Weidenfeller, Owomoyela, Reus, Hummels ni Blaszczykowski (blessés), Augsburg privé de Jentzsch, Pakhurst, Koo, Bancé ni Philp (blessés).
Classement (28 matchs): 1. Bayern 75 2. Dortmund 55 3. Leverkusen 49 4. Schalke 45 5. Freiburg 42 6. Francfort 42 7. Mönchengladbach 41 8. Mainz 39 9. Hannover 38 10. Nürnberg 38 11. Hambourg 38 12. Wolfsburg 33 13. Stuttgart 33 14. Brême 31 15. Düsseldorf 29 16. Augsburg 24 17. Hoffenheim 23 18. Fürth 15.
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