C’est un déplacement éminemment festif que s’est offert le peuple jaune et noir du côté de Mayence. Avant le match et dans les tribunes. Sur le terrain, ce fut un brin plus ardu mais, comme souvent à Mainz, le BVB a arraché les trois points après un combat acharné. Avec un but victorieux de Lukasz Piszczek, comme lors de la Meistersaison 2011-2012…
Dans une saison du BVB, il y a toujours l’un ou l’autre déplacement qui vire à la grosse foire en tribunes. Difficile de prévoir pourquoi ni comment, cela dépend du classement, du contexte mais il y a des jours où tu débarques en terrain adverse et que tu t’aperçois que tous les fans dortmundois semblent mus par la même envie de faire la fête (encore plus que d’habitude). C’est ce qui s’est passé samedi. Et ce n’est pas franchement un hasard, on dira qu’il y a des déplacements qui se prêtent beaucoup mieux que d’autres à ces journées de délire collectif, par exemple Hanovre, Berlin, Freiburg, Hambourg, Köln, Düsseldorf, Francfort… Et Mainz.
Mayence est festive
Mayence est une ville plutôt festive. Ce n’est pas un hasard si c’est ici que se tient le deuxième plus grand carnaval d’Allemagne, après celui de Köln. Pourtant, samedi matin, le temps est plutôt maussade sur le Rheinland-Pfalz. Le Rhin est noyé sous la brume, les clochers du Dom disparaissent dans les nuages, une bruine glaciale tombe sur la colossale Zitadelle, la pierre de Drusus qui en est l’emblème est en réfection pour l’hiver, les pavés de l’Altsadt sont rendus glissants par l’humidité ambiante et le Marché de Noël n’a pas encore ouvert ses portes.
On abrège donc la visite touristique pour se réfugier dans les bars, déjà envahis par le peuple borusse. Cela tombe bien : le rendez-vous avec mon Fanclub est fixé dans une vieille brasserie historique de l’Altsadt pour un repas d’avant-match festif où fans des deux camps se côtoient dans la bonne humeur, nous avons toujours entretenu des relations cordiales avec les supporters du Karnevalsverein. Gageons que l’accueil sera moins amical pour notre prochain déplacement, à Herne-West… Et puis, nous avions été un peu frustrés lors de nos dernières visites à Mayence avec une programmation pas idéale : un soir de semaine glacial en décembre dernier en pleine déprime pour la première de Peter Stöger et la saison précédente un dimanche soir au cœur de la polémique autour du départ d’Aubameyang. Forcément, l’ambiance est un peu plus joyeuse un samedi 15:30 avec un BVB en tête du classement.
Choreo
Et puis, ce stade de Mainz est plutôt réussi. Contrairement à d’autres clubs qui ont choisi de reconstruire leur stade sur un autre site que leur stade historique, Mainz a réussi à ne pas trop perdre son âme avec sa nouvelle Arena. Certes, elle est située au milieu de nulle part, entre des champs et une université déserte et un peu sinistre le week-end. Mais avec son grand kop vertical en rouge, bien que plus petit que celui du rival local, le monumental virage ouest du Betzenberg à Kaiserslautern, ce stade ne manque pas d’allure. En arrivant au stade, nous constatons que les fans venus en car ont également enclenché le mode festif. Des tables sont installées sur le parking du stade devant les bus pour improviser des bars à cocktails et les écharpes vendues par les Desperados pour animer le Choreo se vendent à la pelle. C’est toujours sympa, ces objets vendus uniquement pour un déplacement par un groupe ultras, on se souvient du t-shirt à Mönchengladbach, du bonnet à Freiburg ou des maillots à Lisbonne : ça donne une impression d’unité et l’objet en question devient rapidement collector : j’y étais ! Et effectivement, le Choreo des Desperados est plutôt réussi, même si nous n’étions pas idéalement placés en Gästeblock pour en profiter.
Le jeu de patience
L’entraîneur de Mainz, Sandro Schwarz, a été coéquipier puis joueur de Jürgen Klopp au FSV. C’est donc encore un disciple de Wolfgang Frank. Certes, le Karnevalsverein n’entame pas la partie avec un pressing aussi intense qu’il le faisait à l’époque où Jürgen Klopp ou Thomas Tuchel étaient encore sur son banc. Mais nous avons à nouveau affaire à un adversaire très combatif et au jeu très vertical une fois le ballon récupéré. De notre côté, Lucien Favre a de nouveau choisi de miser sur la patience. Malgré l’annonce de son transfert définitif la veille, Paco Alcacer débute sur le banc et c’est Mario Götze qui commence à la pointe de l’attaque : le projet de Lucien Favre, c’est de miser sur la patience, d’user l’adversaire et de garder des cartouches en réserve pour les faire monter sur le terrain quand l’équipe en face commence à fatiguer.
De fait, la première mi-temps, malgré une certaine domination dortmundoise, est un combat acharné, un vrai match de Bundesliga sous le crachin de novembre, typiquement le genre de bataille qui nous a souvent été fatal ces dernières saisons. En première mi-temps, ce sont surtout les deux gardiens qui se sont mis en évidence : Robin Zentner, le troisième gardien du FSV aligné en l’absence des titulaires Adler et Müller, montre ses qualités en s’interposant devant Zagadou et Witsel. En face, Roman Bürki n’est pas en reste avec un sauvetage du pied et une claquette pour dévier en-dessus de transversale. 0-0 mi-temps, tout reste à faire mais nous ne sommes pas plus inquiets que cela : le BVB 2018-2019 est une équipe de deuxième mi-temps.
Coaching gagnant
Pourtant, après la pause, c’est le Karnevalsverein qui se montre le premier dangereux. Deux frappes juste à côté de Mateta et Latza font prendre conscience du danger à Lucien Favre qui se décide enfin à utiliser son arme fatale, Paco Alcacer. Il restait 26 minutes à jouer et l’Espagnol n’aura besoin que de trois minutes pour ouvrir le score dans le but vide après une magnifique combinaison entre Jadon Sancho et Marco Reus sur la droite. Encore une fois, le jeu de patience de Lucien Favre a payé : on laisse l’adversaire se fatiguer, s’enhardir et, dès que les espaces commencent à s’ouvrir, on envoie nos flèches pour en profiter. Nous pensions que le plus dur était fait mais ce FSV Mainz a de la ressource. Quatre minutes après l’ouverture du score, le Karnevalsverein profite d’un petit relâchement dans nos lignes arrières et d’une déviation malencontreuse de Witsel qui prend Zagadou à contre-pied pour transpercer notre axe central et permettre à Quasion d’égaliser seul devant Bürki. Tout était à refaire. Mais il en fallait plus pour ébranler ce BVB au moral d’acier.
Piszczek, comme en 2011
Il ne faudra que six minutes au BVB pour reprendre l’avantage. Après un premier tir contré, Lukasz Piszczek arme une frappe en pleine lucarne qui heurte la transversale et rebondit derrière la ligne. Trois buts en dix minutes, la folie en Gästeblock. Et ce but nous rappelle furieusement celui que Piszczu avait inscrit dans cette même Arena de Mainz, pour notre premier match là-bas en septembre 2011, quelques semaines après son inauguration. On jouait la 7ème journée et le BVB avait complètement raté son début de saison. Nous accusions déjà 8 points de retard sur le Bayern Munich et même virtuellement 11 à la mi-temps puisque nous étions menés 1-0 alors que le Rekordmeister s’imposait facilement contre Leverkusen. Le titre semblait d’ores et déjà perdu. Mais le Borussia avait égalisé en deuxième mi-temps et Luksaz Piszczek avait arraché le but de la victoire à la 90e d’une frappe un peu similaire à celle de samedi. Le tournant de notre saison 2011-2012 : ensuite, le BVB n’avait plus perdu le moindre match de Bundesliga, avait refait son retard sur le Bayern et était devenu champion d’Allemagne ! Notre situation actuelle est bien plus confortable qu’elle ne l’était à l’automne 2011 et le but victorieux de notre Polonais ne constitue peut-être pas le même tournant qu’à l’époque mais ces victoires obtenues comme samedi, dans la douleur, une Arbeitsieg, sont très précieuses : gagner sans forcément bien jouer, c’est ce qui nous manquait depuis quatre saisons et nous empêchait de pouvoir vraiment lutter pour le Meisterschale.
Auswärtsieg !
Le BVB a su serrer les rangs dans le dernier quart d’heure pour ne pas concéder une deuxième égalisation, la fête jaune et noire était donc réussie et nous avons pu célébrer dans la liesse nos héros. Et pour que la fête soit complète, une bonne nouvelle nous est parvenue de Munich : aucun d’entre nous n’avait imaginé que le Rekordmeister perdrait des plumes à domicile contre le modeste promu Düsseldorf. Surtout quand l’écran géant a indiqué qu’il menait 3-1. C’est dire l’ovation qui a accueilli l’annonce du score final de 3-3 entre le Bayern et le Fortuna.
Cela nous donne Null Neun points d’avance sur le sextuple champion d’Allemagne en titre : on en vient presque à nous demander si le danger pour la quête du Meisterschale ne viendra pas d’ailleurs. Leipzig et Hoffenheim sont toujours menaçants, Francfort, après quelques difficultés en début de saison avec le changement d’entraîneur et les nombreux départs, est irrésistible en ce moment. Et puis il y a surtout le faux Borussia, celui de Mönchengladbach : les Fohlen sont éliminés en Coupe d’Allemagne et ne jouent pas de Coupe d’Europe, leur profondeur de banc n’a rien à envier à la nôtre, ils pourraient donc bénéficier d’un surcroît de fraîcheur à la fin de chaque tour. Et nous allons les jouer à chaque fois lors de l’ultime journée… même si la perspective d’un Borussen-Derby lors des 17èmes et 34èmes journées entre deux Borussia en tête du classement fait déjà fantasmer tout le peuple jaune et noir.
Mais d’ici là, il reste quelques échéances à ne pas rater : assurer la qualification en Ligue des Champions contre notre bête noire des matchs retours, Bruges, puis battre Freiburg pour aborder dans les meilleures conditions le sommet de cette première partie de saison : le Derby du 8 décembre à Herne-West ! En attendant, cette victoire à Mayence a été fêtée comme il se doit. Spitzenreiter, Spitzenreiter, hey, hey ! Devant l’Opel Arena, des grands drapeaux étaient ornés de l’inscription « Unser Traum lebt », notre rêve vit, la devise du FSV pour cette saison. Mais en ce moment, c’est bien le rêve du BVB qui continue !
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