Le 25 décembre dernier, le président du Borussia Dortmund, Herr Doktor Reinhard Rauball a fêté son 72ème anniversaire. Il y a quarante ans, âgé alors seulement de 32 ans, ce jeune avocat entamait le premier de ses trois mandats (1979-1982, 1984-1986 et 2004- ???) à la tête du BVB. Il est revenu sur cette longue histoire d’amour en jaune et noir pour le site officiel du club.
Bonjour M. Rauball, vous étiez jadis un défenseur redouté, vous tâtez encore du ballon ?
Naturellement ! Chaque semaine ! Lorsque mon emploi du temps le permet.
En ces périodes froides, sûrement dans des halles chauffées…
Non, le football se joue à l’extérieur, quel que soit le vent ou le temps ! C’est toujours le vendredi à 21h avec mes vieux potes de l’Eintracht Dortmund. C’est un horaire sacré. Si le BVB joue le vendredi soir, alors nous déplaçons au samedi après-midi. Sinon, je joue aussi volontiers avec la Traditionsmannschaft du BVB.
Quelles conditions pose le président pour de telles apparitions ?
C’est clairement défini. Je reçois toujours le numéro 10, la garantie de pouvoir sortir et une tablette de chocolat ! Sinon, cela ne va pas.
Vous avez assumé le mandat de président du BVB pour la première fois en 1979. Il se trouve que, symboliquement, les dernières semaines ont été le reflet des 40 dernières années. Comment avez-vous vécu ces hauts et ces bas récurrents ?
Oh, si vous exercez une activité aussi longtemps et intensément que celle que je conduis au BVB, alors vous n’allez pas vous laissez renverser par une brutale défaite à Munich. Même si je dois dire que notre prestation à Munich n’était pas digne d’un club comme le Borussia Dortmund, pas dans notre conception et ne cadrant pas avec notre sucess story des dernières années. Peu importe. La vie continue, a déclaré un jour un philosophe bien connu.
Charbon, acier, bière et Borussia
Le philosophe Reinhard Rauball a déclaré un jour : pour Dortmund, il y quatre choses qui sont importantes : le charbon, l’acier, la bière et le Borussia. Cela n’est pas resté.
Malheureusement. Dortmund était mondialement connu pour le charbon, l’acier et la bière. Quand je suis arrivé en 1960, il y avait huit brasseries. Huit brasseries ! Du charbon et de l’acier, on ne parle aussi plus. Il ne reste que le Borussia. Indestructible. Nous l’avons prouvé quelques fois au cours des 40 dernières années.
Vous êtes venu à Dortmund à l’âge de 14 ans avec votre famille. A cet âge, on a normalement déjà choisi d’être fan d’une équipe de football. Il n’y avait pas grand-chose dans votre ville natale de Northeim. Dans de tels cas, de nombreux Erfolgsfans soutiennent aujourd’hui le Bayern Munich.
Le Bayern n’existait pas à l’époque, du moins pas dans sa dimension actuelle. Northeim se trouve au sud de la Basse-Saxe, dans la zone d’influence d’Hambourg, mais je n’étais pas un fan du HSV et je n’avais jamais vu un match d’eux. Ma véritable conversion au football n’est intervenue qu’en 1960 après notre déménagement à Dortmund.
Vous êtes arrivé par hasard à la tête du BVB.
A cause d’une erreur de débutant, laquelle ne serait plus jamais arrivée par la suite. J’étais un jeune avocat de 32 ans, dans une Etude renommé de Dortmund, qui représentait également le BVB. En conséquence, il y avait des contacts réguliers avec le club.
A l’époque les choses étaient complètement détraquées au BVB.
Oh oui. Le comité a démissionné, puis démissionné de nouveau, le président s’est retiré puis retiré encore une fois. Le président Heinz Günther, un homme très honorable, directeur de mine à la Zeche Gneisenau. Il ne voulait tout simplement plus. Il y avait également des conflits entre l’entraîneur Carl-Heinz Rühl et l’équipe. Et de près ou de loin, il n’y avait aucun président en vue. Puis un jour, le président du conseil d’administration de la Stadtsparkasse Dortmund (caisse d’épargne), un membre influent de notre conseil économique, m’a rendu visite. Je ne savais absolument pas pourquoi, cela ne pouvait pas être dû à mon compte, il était en règle. Cet homme trouvait que c’était une bonne idée de me nommer président. Je ne le pensais pas mais je n’étais pas du tout préparé à cette question. J’ai dit : « Non, je ne vais pas le faire. Mais si vous ne trouvez personne d’autre, vous pouvez rappeler ». Puis il a mentalement levé les bras et dit à ses gens : « Nous en avons un mais il ne le sait pas encore ». Peu après, j’ai été élu.
En 1979, quatre joueurs étaient plus âgés que vous. Comment un si jeune blanc-bec a t’il été accueilli dans le vestiaire ?
Je savais que si tu rentrais là-dedans avec les genoux qui tremblaient, tu avais perdu une fois pour toutes. Alors j’ai eu confiance en moi, je me suis présenté et j’ai dit ce que j’avais en tête. D’abord assurer le maintien puis jeter les bases économiques d’un avenir meilleur. Après des discussions avec l’équipe, j’ai constaté le problème avec l’entraîneur et nous nous sommes séparés de Calli Rühl. Ensuite, nous avions besoin d’un entraîneur qui, pour rester poli, allait tenir l’équipe par le cou pendant six mois. Uli Maslo a su qu’il ne serait sur le banc que pendant six mois pour la transition.
Vous aviez une grande solution : Udo Lattek !
Il était enthousiaste à l’idée de rajeunir l’équipe et de reconstruire quelque chose ici. Avec de jeunes joueurs issus de nos juniors. Eike Immel était déjà dans le but à 17 ans. Ensuite, Michael Zorc, Ralf Loose et Ralf Augustin sont venus, une année plus tard Erdal Keser. D’une manière ou d’un autre, nous avons dû remettre le public de notre côté. Quand j’ai commencé, nous avions en moyenne 20’000 spectateurs. Ce n’était pas notre ambition et ce n’étais pas non plus une base économique suffisante.
Recrutement à la Kölsch
En 1979, Udo Lattek était l’entraîneur allemand le plus couronné de succès, il avait gagné trois Meisterschale avec le Bayern et trois avec Mönchengladbach, il était vainqueur sortant de la Coupe UEFA. Et là, le jeune Reinhard Rauball, âgé de 32 ans, l’a appelé et l’a convaincu de rejoindre le Borussia Dortmund, qui était un club médiocre à l’époque. Comment avez-vous fait ?
Je me suis renseigné sur ses habitudes, je l’ai rencontré dans un Kneipe à Köln et j’ai bu quelques Kölsch. Ensuite, le courant passe ou pas. Avec Udo, ça a passé. A la fin, il voulait juste savoir : « Nous devons signer maintenant par écrit ? » J’ai répondu : « Je suis avocat, c’est ce que j’ai appris durant mes études. »
Sur la photo de l’époque, vous portez des lunettes extravagantes. Vous avez volé celles d’Elton John ?
Hum, il en avait des pareilles ? Nous nous sommes rencontrés une fois, ce devait être à la fin des années 1970 ou au début des années 1980, quand il était président et propriétaire du FC Watford.
Une autre anecdote amusante durant votre premier mandat : à l’été 1979, vous et votre ancien club d’Eintracht Dortmund avez joué un match amical contre les pros du Borussia Dortmund. Comment est-ce arrivé ?
Vous savez, c’était une sorte d’indemnité de transfert. J’avais grandi comme footballeur au DSC 95 (n.d.l.r : le plus ancien club de Dortmund) et j’ai intégré la direction après la fusion avec l’Eintracht. Ensuite, le BVB m’a posé la question pour la présidence et j’ai dit : d’accord, mais pour cela vous devez jouer un match amical contre nous. Et naturellement, j’ai voulu être là. Nous avions toujours joué en quatrième division, nous n’étions pas une équipe de poivrots.
Il en reste une jolie photo. Vous êtes à la lutte avec Manni Burgsmüller. Tous les deux complètement concentrés sur le ballon, aucun ne voulait céder.
Vous pouvez constater que la photo a été prise dans un coin. Nous voulions tous deux la balle, lui pour marquer le but, moi juste pour l’éviter. C’est ainsi que fonctionne le football, en Bundesliga comme dans les divisions amateurs.
Le BVB a gagné 9-0, Burgsmüller a marqué cinq buts. Votre entraîneur n’aurait-il pas pu vous confier un autre joueur à marquer ?
Absolument pas ! Il m’a d’abord demandé : contre qui veux-tu jouer ? Moi : naturellement contre le meilleur, contre Burgsmüller.
Pendant le match, il a arraché la chaîne en or autour de votre cou.
Je crois que ce n’était pas Manni mais Wolfgang Vöge. J’étais probablement trop rapide pour lui, il ne pouvait pas m’arrêter autrement. Petite blague. Sérieusement : la confrontation sur le terrain avait été très amicale, comme toujours, je garde toujours une très bonne relation avec tous les anciens joueurs. Je joue au tennis avec Lothar Huber, j’ai eu de très bonnes relations avec Manni Burgsmüller jusqu’à son décès en mai dernier, encore aujourd’hui avec Rüdiger Abramczik, Mirko Votava, Jupp Tenhagen, Erdal Keser et la liste serait trop longue. Même Marcio Amoroso, dont j’ai critiqué l’engagement parce qu’il était irresponsable pour des raisons financières, m’a sauté au cou lors d’une visite à Dortmund il y a une année et demi. Lorsque vous appelez dans la forêt, cela répond toujours.
Lors de votre premier mandat vous avez consolidé le club sportivement et financièrement. Combien de mandats le travail du président bénévole Rauball a t’il coûté à l’avocat Rauball dans sa profession principale ?
Oh, je ne peux pas le dire exactement mais cela prenait beaucoup de temps. Je devais gagner de l’argent comme jeune père de famille avec une épouse et deux filles. A cette époque, comme président d’un club de Bundesliga, vous étiez un représentant et le chef de la direction mais aussi le manager. Je conduisais seul les négociations avec l’entraîneur et les joueurs.
Quels ont été les plus difficiles ?
D’abord avec Manni Burgsmüller. Ils avaient des relations difficiles d’abord avec Calli Rühl et, après son licenciement, avec Uli Maslo. Celui-ci l’avait mis sur le banc lors du dernier match de la saison puis l’avait envoyé s’échauffer sans le faire rentrer. Manni était profondément humilié, il a dit : faites ce que vous voulez, je vais partir. Il a fallu plusieurs discussions pour le convaincre du contraire. L’année suivante, avec Udo Lattek, il était notre capitaine et notre meilleur buteur.
Trois ans et puis fini !
Si on vous avait dit à l’époque que vous reviendriez deux fois comme sauveur et que vous travailleriez si longtemps pour le BVB…
Mon imagination ne m’aurait jamais porté aussi loin. Je voulais terminer mes trois ans et ensuite fini ! J’aimais être avocat, j’aimais mon travail, je me suis beaucoup amusé à l’exercer. Aujourd’hui, tout le monde a oublié que j’ai été le premier avocat en Allemagne à enseigner à l’Institut des Sports de l’Université de Bochum sur le thème « Sport et droit ». C’était une toute nouvelle direction dans la jurisprudence. Le sport était à l’époque moins fortement impacté par des problèmes juridiques mais cela ne veut pas dire qu’il n’y en avait pas.
Seulement deux ans après la fin de votre premier mandat, vous devez reprendre du service. Le BVB était à nouveau tombé très bas.
Plus bas, ce n’était pas possible. Des dettes par millions, une équipe tout en bas du classement. Je me souviens encore de ce week-end angoissant où nous avions perdu 0-2 à domicile contre Karlsruhe.
Les fans dans la Südtribüne criaient déjà depuis des semaines « Direction, entraîneur, Tippenhaus (le manager), dehors », « Reinhard Rauball reviens à Dortmund ».
Je peux me souvenir de la première phrase, pas de la deuxième. Je n’avais rien vu du match contre Karlsruhe parce que j’étais avec un ami sur son bateau au large des côtes néerlandaises. Après cela, nous voulions ramener le navire en Allemagne mais, pendant le trajet, un pneu a éclaté sur la remorque. Cela a duré et duré. Quand je suis enfin rentré à la maison, ma femme m’a montré une feuille A4 avec la liste de toutes les personnes que je devais rappeler rapidement. Tous des journalistes et des membres de conseil économique. Peu de temps après, j’ai été désigné par le tribunal de district comme directeur d’urgence. Ma condition était : tout le monde doit partir.
Vous avez immédiatement limogé l’entraîneur et le manager.
D’abord seulement le manager Hans-Dieter Tippenhauer. Le déclin avait ses raisons. Avant la saison, il a vendu Manni Burgsmüller et Rüdiger Abramczik, nos deux meilleurs buteurs. Une erreur incroyable, le manager devait répondre de cela. Immédiatement après, j’ai parlé à l’entraîneur Konietzka. « Timo, si tu penses maintenant que vais te virer, tu te trompes. J’ai uniquement licencié notre manager. » Mais la situation était trop difficile, nous avons dû faire plus tard une déclaration. Et là Timo est malheureusement aussi parti.
La situation sportive était une chose. La situation financière était beaucoup plus grave.
La DFB ne voulait pas nous accorder la licence pour manque de capacité économique, comme indiqué dans les statuts. Nous avions besoin d’argent frais. Dans une telle situation, vous pouvez vous rendre à votre banque locale, nous l’avons fait mais nous n’avons eu qu’un sourire désolé. Vous pouvez aussi vous tourner vers les sponsors mais il n’y en avait qu’une poignée dans le magazine du club. Il ne nous restait que les recettes des spectateurs mais notre stade était encore trop petit et avec de très nombreuses places debout, cela ne suffisait absolument pas. Il nous manquait alors 1,2 millions de DM.
Un coup de bluff à 1,8 millions de DM
Vous avez alors actionné vos contacts.
J’étais alors président du conseil de surveillance d’une entreprise de mode à Munich, mon adjoint était un homme influent de la Deutsche Bank. La semaine au cours de laquelle le DFB nous demandait de faire la preuve de nos liquidités, nous nous sommes rendus par avion à un conseil de surveillance à Munich. Nous étions assis à côté avec mon adjoint et je lui ai demandé un prêt pour le BVB.
Qu’il vous a refusé.
Il m’a insulté, je vais garder les mots exacts pour moi. Comme je n’avais pas d’autre solution, je lui ai dit : faites attention, si vous refusez maintenant, je dirais partout : la Deutsche Bank est responsable si le BVB ne reçoit pas la licence.
Carrément !
Oui mais pas très sérieusement, je dois l’avouer par la suite. Peu importe, il a eu l’air très surpris et m’a demandé : de quoi s’agit-il ? Je voulais 1,2 millions mais j’ai pensé : si je lui dis cette somme, il ne va peut-être me donner que 500’000. Alors j’ai dit : 1,8 millions.
Combien avez-vous reçu ?
Pas si vite. Nous sommes revenus à la séance à Munich, nous nous asseyons à nouveau à côté et je lui demande: vous ne pouvez pas vous-même donner une impulsion, vous avez de l’influence. Il acquiesce et dit : je l’ai fait pendant ma pause déjeuner.
Une bonne chute.
La chute est encore à venir : plus tard, il m’appelle et me raconte un appel téléphonique avec son chef, Alfred Herrhausen. Avant de travailler à la Deutsche Bank, celui-ci était actif au conseil d’administration de VEW à Dortmund. Mon interlocuteur l’a appelé et lui a dit : Dr. Herrhausen, j’ai rendu hier un très grand service à votre ville et j’ai accordé une ligne de crédit de 1,8 millions au BVB. Silence au bout de la ligne.
Aviez-vous peur que l’entreprise puisse encore éclater ?
Certainement. Alfred Herrhausen a attendu un moment avant de répondre. Dans tels moments, les secondes deviennent des heures. Puis il dit : tu as fait du bon travail. Mais l’histoire continue. La Deutsche Bank m’a pris comme débiteur solidaire pour le prêt. Cela m’a valu beaucoup de cheveux gris. J’espère que mon épouse ne lira pas cette interview. Je ne lui en ai jamais parlé.
Vous avez maîtrisé la situation sur le plan économique mais la crise sportive s’est poursuivie jusqu’à la fin de ce second mandat – jusqu’au barrage contre la relégation contre Fortuna Köln en 1985-1986. Le match aller a été perdu 2-0, au retour ce n’était que 2-1 peu avant la fin, le BVB avait une jambe et demi en deuxième division. Ensuite, Jürgen Wegmann a arraché un match d’appui avec son but. De combien d’années aviez-vous vieilli ce lundi de Pentecôte ?
Quel âge voulez-vous encore me donner ? Mais c’est vrai que j’ai pensé encore longtemps à ce terrible après-midi. Rölli Russmann m’a demandé plus tard : « tu te souviens que peu avant la fin tu étais debout le long de la ligne de touche ? » Non, je ne me souviens pas. J’étais comme fou. Qui veut entrer dans l’Histoire comme le président qui a conduit le BVB en deuxième division ? Je me souviendrai toujours du but de Wegmann et, mon Dieu, il a hésité si longtemps. Le gardien s’est jeté à terre, Wegmann a attendu, j’ai crié « mais tire enfin ». Jusqu’à ce que la balle finisse enfin au fond ! Après le match décisif suivant (n.d.l.r. le match d’appui contre Fortuna Köln a été gagné 8-0), j’ai pu me retirer la conscience tranquille et, avant de partir, j’ai encore fait quelques transferts importants : Thomas Helmer, Nobby Dickel, Frank Mill et Teddy de Beer. Peu de temps après, le BVB pouvait retrouver les compétitions internationales.
Le successeur recruté dans un Kneipe
Et vous avez donné le goût du football à votre successeur Gerd Niebaum.
C’est vrai mais c’était durant mon premier mandat et c’était en réalité ma femme. Elle était allée à l’école avec Gisela Niebaum. Une fois, nous étions dans un Kneipe à Dortmund et les Niebaum sont arrivés. Ce fut une belle soirée et, à un moment, Gerd Niebaum a prononcé cette phrase en toute décontraction : « M. Rauball, je voudrai aussi faire ce que vous faites. » Ensuite, j’ai complètement oublié cela. Jusqu’à ce que, quelques années plus tard, le tribunal de district me nomme comme directeur du conseil d’urgence et j’avais besoin d’un vice-directeur. Au petit-déjeuner, ma femme me dit : prends Niebaum, il avait de l’intérêt.
Vous avez suivi ce qu’a fait votre successeur ?
Il m’a immédiatement proposé la présidence du conseil économique mais je ne la voulais pas. Comme on le sait, il n’y a que deux mauvaises personnes, le prédécesseur et le successeur. Premièrement, je ne voulais pas interférer avec mon successeur et deuxièmement je ne voulais pas devenir un éternel fonctionnaire du football. J’ai réussi l’un… l’autre, voilà.
Au BVB, sous Niebaum, les choses ont fortement progressé.
D’abord, la victoire en DFB-Pokal, puis la Ligue des Champions, deux fois le titre avec Ottmar Hitzfeld, une autre fois avec Matthias Sammer – sportivement ce fut une période grandiose.
Mais déjà lors du titre de 2002, on pouvait voir que les conditions cadres à Dortmund n’étaient pas les mêmes qu’à Munich ou Hambourg. L’équipe était tout simplement trop chère pour être financée à long terme. Pourquoi personne n’a voulu voir cela ?
Je ne peux pas répondre à cette question.
Auriez-vous souhaité avoir un droit de regard?
Cela aurait certainement facilité les choses. Et certaines choses auraient évolué différemment. Pas de joueurs super chers comme Marcio Amoroso, pas d’extension du stade. Alors, malgré l’introduction en bourse entretemps, nous n’aurions pas failli faire faillite.
Lorsque l’urgence était si grande fin 2004, on est venu vous rechercher une troisième fois.
J’ai hésité.
Votre épouse ne devait pas être très enthousiaste.
Je ne vais pas vous dire comment elle a réagi mais à la fin il y avait la phrase : « fais ce que tu penses être juste ». Comme moi, elle savait très bien ce qui allait arriver. Toute l’année 2004 a été tellement chargée médiatiquement que ça aurait très bien pu se terminer avec un point d’interrogation se trouvant sur mon front. Devenir président du club, c’est aussi présider le comité consultatif et le comité exécutif. Ainsi, conjointement avec mes collègues du board, nommer la direction et effectuer les tâches de contrôle, notamment approuver les budgets et les plans d’investissements des exercices successifs. Seul peut faire cela quelqu’un qui connaît déjà la boîte. Si un candidat arrive et doit s’y habituer, l’affaire va finir dans un mur. Je ne voulais pas me le reprocher.
Vous vous êtes vous-même laissé mettre sous pression comme vous l’aviez fait plus tôt avec l’homme de la Deutsche Bank. Si Reinhard Rauball ne reprend pas le relais, alors il sera coupable si le Borussia Dortmund disparaît.
On peut dire cela comme ça.
Aki Watzke, le meilleur transfert de tous mes mandats
Quelques semaines plus tard, en mars 2005, a lieu la légendaire assemblée dans le terminal de l’aéroport de Düsseldorf. Vous deviez convaincre les souscripteurs du fonds immobilier Molsiris de largement renoncer à leurs prétentions pour que le club puisse racheter une part du stade et conserver de la liquidité. Nous avons également une belle photo de ce jour-là : comment vous êtes avec Aki Watzke sur le chemin de l’assemblée. C’était encore incertain comment les choses allaient tourner.
Vous voyez la mallette dans ma main au bord de l’image ? Elle doit maintenant être au musée. J’ai toujours la cravate aussi. Ce fut une journée incroyablement éprouvante pour les nerfs. Après tout, lors du sauvetage de 1984, j’ai eu cette idée absurde avec la Deutsche Bank, nous avons pu résoudre problème avec un peu d’imagination. Ce n’était pas possible sous cette forme avec Molsiris. Je ne sais pas combien d’heures nous sommes restés assis. Tout dépendait du vote des souscripteurs. Au nom du peuple… Nous avions besoin d’au minimum 75% d’approbation du projet d’assainissement. Avec 72 ou 74%, aussi pas des mauvaises valeurs, tout aurait été perdu et nous aurions dû déposer le bilan immédiatement. Le résultat devait s’illuminer devant nous sur le mur.
Vous vous êtes caché les yeux ?
J’ai regardé directement en face. Nous n’avions aucune idée et aucun sentiment de comment cela allait se passer. Sur 5000 souscripteurs, seuls 444 étaient présents, même pas 10%. Etaient-ce des gens avec un cœur jaune et noir ? Ou des opportunistes, qui voulaient récupérer leur argent ? Je me souviens encore d’avoir parlé à un couple, l’homme n’a rien dit, la femme m’a dit : « on écoute les arguments puis je décide ». Une histoire drôle, normalement ?
Vous n’avez probablement pas beaucoup rigolé à ce moment-là.
Seulement lorsque le résultat est apparu à l’écran. 96 virgule quelques chose.
Puis une nouvelle ère de succès est arrivée. Avec vous comme président et Aki Watzke comme directeur général. Avec lui, c’était peut-être le meilleur transfert de vos trois mandats de président ?
On peut le dire ainsi. Oui.
En 2004, vous n’aviez certainement pas l’intention d’occuper ce poste jusqu’en 2019 et au-delà.
En aucun cas. J’avais été élu pour trois ans, jusqu’en 2007. C’était une période cruciale. D’abord la restructuration avec le prêt de Morgan Stanley, à l’été 2006, au moins 79,2 millions d’euros. Nous avons réduit la dette de 122 millions d’euros relativement rapidement. Tant que ces deux étapes n’étaient pas terminées, je me sentais encore dans le devoir. Pensez aux problèmes avec le stade : avant d’avoir réussi l’opération avec Molsiris, nous devions payer entre 17 et 20 millions d’euros de loyer par année. C’était une politique de finance et d’assainissement à hauts cris.
Même si cela n’était pas planifié ainsi : le Borussia Dortmund est-il devenu votre projet de vie ?
On ne doit peut-être pas utiliser ce vocable. Mais si vous le faites depuis 20 ans avec une telle intensité, c’est déjà quelque chose hautement accaparant.
Et tout a commencé avec cette phrase : si vous ne trouvez personne d’autre…
Vous pouvez être sûr d’une chose : je ne dirai plus jamais cette phrase dans ma prochaine vie.
Entre les deux, vous avez été président de la Ligue allemande de football.
Oui, ce furent au total 12 ans (2007-2019). C’était une époque aussi pleine de défis que variée, tant au niveau national qu’international, avec comme point culminant la Coupe du Monde 2014 comme membre de la délégation de l’équipe nationale.
L’une des tâches du président de la DFL est de remettre le Meisterschale au champion en fin de saison. La plupart du temps, vous avez dû féliciter les camarades sportifs de Munich.
Toujours à Philipp Lahm, la première fois ma plus jeune fille m’a dit : « papa, tu dois dire à Philipp que le Schale n’est que prêté ». Ce fut longtemps un gag courant entre Lahm et moi. A chaque fois que nous nous rencontrions, il me disait : « Je sais déjà, M. Rauball, le Schale n’est que prêté. »
Les fans restés fidèles dans les années difficiles ont sauvé le BVB
Jusqu’à ce que vous ayez pu enfin remettre la bonne pièce à Roman Weidenfeller en 2011. Devant 80’000 spectateurs au Westfalenstadion. Quel moment sublime.
Exceptionnel. Cela donne un nouveau sentiment envers la vie. Et encore une fois l’année suivante puis la Pokal – et encore la finale de la Ligue des Champions à Wembley. J’ai senti que c’était un signe du destin et, avant toutes choses, un cadeau aux fans qui par leur fidélité durant les années difficiles ont grandement contribué au sauvetage du BVB.
En 2019, l’espoir d’un nouveau titre était si grand que lors de la dernière journée, vous ne vous êtes pas rendu à Munich avec le Meisterschale original mais avec une copie pour le match du BVB à Mönchengladbach.
Ce fut aussi une expérience grandiose. Dans les médias, on entend toujours : la Bundesliga est devenue terriblement ennuyeuse ! Beaucoup ont évidemment oublié que la saison passée deux équipes pouvaient remporter le championnat lors de la dernière journée. La question s’est posée à la DFL : que faisons-nous avec le trophée ? Donc Christian Seifert, comme directeur général, est allé à Munich et je suis allé à Mönchengladbach. Nous avons tous les deux commenté cette répartition des rôles avec un léger sourire.
Pour finir, encore une question essentielle, ne le prenez pas mal. Mais combien de temps allez-vous encore faire tout cela ?
Je pensais bien que vous alliez m’attendre au tournant avec cela. La durée de mes mandats a toujours été la même que celui que j’ai commencé en premier, trois ans. Une seule fois j’ai fixé un objectif fixe dès le début parce que j’avais des obligations en tant qu’avocat. Le 24 novembre 2019, j’ai été réélu par l’assemblée générale. Cela implique une immense responsabilité et je veux et dois l’assumer. Plus loin, nous verrons mais à la fin c’est l’assemblée générale qui décidera.
Source : bvb.de
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