Ce soir-là, l’équipe qui dominait alors le football européen n’avait pas eu l’ombre d’une chance sur la pelouse gelée du Kampfbahn Rote Erde. Surclassé dans tous les duels par onze Dortmunder Jungs presque tous sortis des mines et usines du Pott, le grand Benfica Lisbonne avait été atomisé 5-0. Cétait le jour de gloire de Franz « Goldköpfchen » Brungs.

Le contexte. Si le Real Madrid a dominé les premières éditions de la Coupe d’Europe des clubs champions dans la deuxième moitié des années 1950, le début des années 1960 a été marqué par la suprématie du Benfica Lisbonne. Entre les saisons 1960-1961 et 1964-1965, les Portugais vont jouer quatre fois la finale en cinq éditions : deux victoires (1960-1961, 3-2 contre Barcelone et 1961-1962 5-3 contre Real Madrid), deux défaites (1962-1963 1-2 contre l’AC Milan, et 1964-1965 0-1 contre l’Inter Milan). Durant cette période dorée, Eusebio et ses camarades n’auront donc manqué qu’une seule finale : celle de 1963-1964. Et s’ils l’on manquée, cette finale, c’est parce que leur trajectoire a eu le malheur de croiser celle du Borussia Dortmund en huitième de finale.

Pourtant, face au triple finaliste sortant, le BVB faisait figure de petit poucet. Lors de ses deux premières participations à la C1, le BVB avait à chaque fois connu une élimination prématurée, en huitième de finale en 1956-1957 (Manchester United) et en quart de finale en 1957-1958 (AC Milan). Après avoir gagné le Meisterschale 1963 contre Köln et sorti les Norvégiens du SK Lyn Oslo au premier tour, le BVB faisait donc figure d’outsider face au club lisboète. Mais au match aller, le gardien Hans Tilkowski multiplie les parades, Reinhold Wosab inscrit le fameux but à l’extérieur et, même si le légendaire Eusebio donne la victoire au Benfica, la courte défaite 2-1 laisse toutes ses chances au BVB pour le retour.

Le match. Il faisait froid, très froid ce soir-là au Rote Erde, le terrain était gelé. Et pourtant, 41’500 fans remplissent les gradins. Officiellement. En réalité, ils devaient être plutôt 60’000, il y avait même des fans perchés dans les arbres, qui avaient patienté plusieurs heures dans le froid pour assister au premier grand exploit européen de l’Histoire du BVB. Car les Portugais sont complètement déstabilisés par les conditions de jeu, l’ambiance et l’agressivité (dans le bon sens du terme) des Borussen. Onze joueurs pas très connus sur le plan international, tous issus du Ruhrpott ou des environs, onze guerriers en mission pour faire tomber la meilleure équipe d’Europe. Nous t’avons déjà relaté ce match d’anthologie ici. Benfica n’arrive à pas à faire parler sa maîtrise technique supérieure et se fait complètement manger dans les duels par nos Jungs déchaînés. Les actions se multiplient devant le but portugais. Et finalement, après une demi-heure, un tacle rageur du capitaine Wilhelm Burgsmüller suivi d’un centre permet à Timo Konietzka d’ouvrir le score. Le début du cauchemar pour les Portugais.

Le(s) but(s). Et, si c’est une victoire d’équipe, le cauchemar portugais va avoir un nom en particulier ce soir-là : Franz Brungs. L’attaquant du Borussia va s’offrir un triplé de prestige en l’espace de douze minutes contre la meilleure équipe d’Europe ! Deux minutes après l’ouverture du score, Franz Brungs profite d’une déviation géniale de Timo Konietzka pour doubler la mise d’une demi-volée sous la latte. Mais c’est surtout le 3-0 qui est entré dans la légende : aile de pigeon sur l’aile droite, triangulation entre Konietzka, Emmerich et Schmidt et conclusion de Brungs après un ricochet sur le poteau. Trois buts en quatre minutes, Benfica est KO debout. Et le BVB n’a pas relâché la pression après la mi-temps : dès la reprise, Franz Brungs fera honneur à son surnom, Goldköpfchen, pour inscrire le 4-0 de la tête, son troisième but en 12 minutes !

La suite. Reinhold Wosab scellera le score à 5-0 à la 58e. Tous les goals sont tombés en 25 minutes, entre la 33e et la 58e ! C’est un coup de tonnerre dans le football européen, voir tomber de manière aussi brutale le grand Benfica Lisbonne. En quart de finale, le BVB se qualifiera contre les Tchèques du Dukla Prague, grâce à une victoire 4-0 à l’aller en Tchécoslovaquie (et malgré un retour un peu bâclé au Rote Erde avec une défaite 3-1). L’aventure s’arrêtera malheureusement en demi-finale contre l’Inter Milan d’Helenio Herrera, l’inventeur du catenaccio. Malgré un nouveau doublé de Franz Brungs, le Borussia doit se contenter du match nul 2-2 à l’aller au Rote Erde et s’incline 2-0 au retour à San Siro. Mais le BVB s’est fait pour la première fois un nom sur la scène européenne.

Le héros. S’il a connu son heure de gloire par cette froide soirée de décembre 1963, Franz Brungs n’a pas autrement marqué l’histoire du BVB. Il fait ses débuts au plus niveau au 1. FC Köln avant de passer au rival Borussia Mönchengladbach en 1960. Il y restera trois saisons et c’est chez les Fohlen qu’il s’est vraiment révélé. Surnommé Goldköpfchen, petite tête d’or, en raison de sa chevelure blonde, de sa petite taille (1,73m) et de son adresse dans le jeu aérien, Franz Brungs arrive au BVB juste après le titre remporté par les Borussen en 1963 contre Köln. C’était compliqué de se faire une place dans un effectif champion d’Allemagne et tous copains de longue date. Pourtant, Goldköpfchen va connaître des débuts fulgurants, avec en point d’orgue ce triplé légendaire contre le Benfica. Mais la concurrence était vive pour les postes offensifs avec Emmerich, Schmidt, Konietzka, Wosab, Sturm… Ainsi, il n’est que remplaçant lors de la finale de Pokal 1965 contre Aachen et il décide de quitter le club juste après. Ceci dit, ses statistiques au Borussia forcent le respect : 23 buts en 54 matchs de Bundesliga et 8 en 10 matchs de Coupe d’Europe !

Sa meilleure période, il va la connaître au 1. FC Nürnberg entre 1965 et 1968. Il est l’un des grands artisans du dernier titre remporté à ce jour par der Club, en 1967-1968, terminant deuxième buteur de la Bundesliga avec 25 réussites. Il avait notamment inscrit 5 buts au légendaire Sepp Maier lors d’une victoire 7-3 contre le Bayern Munich. Il a ensuite joué au Hertha Berlin avant de revenir à Nürnberg puis d’entamer une carrière d’entraîneur dans de nombreux clubs de seconde zone. Il n’a jamais eu les honneurs de l’équipe nationale mais il reste comme un très bon attaquant de Bundesliga, capable de démonter les plus grands dans un bon soir. Comme en décembre 1963 contre Benfica.

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